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GUÉRIN (MAURICE DE).

La nature façonne avec sa belle main,
Et qui chantent après, dans leur joie infinie,
Des actions de grâce et l’hymne de la vie ! »
— Je m’écriais ainsi de bonheur radieux,
Et mes regards ardents attachés sur les cieux.
Quand je les rabattis, je ne vis dans les plaines
Que des buissons épars et l’ombre des grands chênes,
Et les calmes rayons du croissant argentin
Me venaient d’un limpide et sauvage lointain,
Et noire monde allait, dans sa couche moelleuse,
S’endormant sous les veux de sa belle veilleuse.


LA ROCHE D’ONELLE


Les siècles ont creusé dans la grotte vieillie
Des creux où vont dormir des gouttes d’eau de pluie ;
Et l’oiseau voyageur qui s’y pose le soir
Plonge son bec avide en ce pur réservoir.

Ici, je viens pleurer sur la roche d’Onelle
De mon premier amour l’illusion cruelle ;
Ici, mon cœur souffrant en pleurs vient s’épancher…
Mes pleurs vont s’amasser dans le creux du rocher…
Si vous passez ici, colombes passagères,
Gardez-vous de ces eaux : les larmes sont amères.