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REFUGE. 111

Ce sont assurément mes frères

Qui se promènent dans les cieux.

Les rois qui dorment mal charment leur insomnie

A regarder courir ces légers rayons d’or :

Au sein de l’éclatante et nocturne harmonie

C’est moi qu’ils admirent encor !

Leur grandeur en soupire et rien dans leur couronne

N’offre l’éclat vivant dont seul je m’environne. »

Ainsi le petit ver se délectait d’orgueil ;

11 brillait. Philomèle, à sa flamme attentive,

Interrompt une hymne de deuil

Que le soir rendait plus plaintive.

Jalouse ou rappelant quelque exilé chéri,

Mélodieuse encor dans son inquiétude,

Amante de ses pleurs et de la solitude,

Elle épuisait son cœur d’un lamentable cri,

N’ayant de tout le jour cherché la moindre proie.

Par instinct, sans projet, sans joie,

Elle descend à la lueur

Qui sert de fanal pour l’atteindre ;

Et, sans même goûter de plaisir à l’éteindre,

S’en nourrit pour chanter plus longtemps sa douleur.

REFUGE

J’irai, j’irai porter ma couronne effeuillée

Au jardin de mon père où revit toute fleur ;

J’y répandrai longtemps mon âme agenouillée ;

Mon père a des secrets pour vaincre la douleur.

J’irai, j’irai lui dire, au moins avec mes larmes :

« Regardez, j’ai souffert... » 11 me regardera,

Et sous mes jours changés, sous mes pâleurs sans charmes,

Parce qu’il est mon père il me reconnaîtra.