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MON ENCRIER

un édifice qui ne reposât désormais que sur les pointes d’aiguilles de sa nouvelle dialectique, aussi mauvaise que prétentieuse. Serai-je taxé d’exagération si je dis que par là M. Bourassa, à lui seul, a fait plus de tort à sa cause que tous les adversaires du nationalisme ensemble ?

Ensuite, frappante contre-partie de son assurance sur le terrain des idées, son embarras constant sur le terrain des faits, son inaptitude foncière à l’action. Rien de plus significatif peut-être, à cet égard, que sa tentative de réforme dans le domaine provincial. On se rappelle cet épisode de sa carrière et comment, entré au parlement de Québec, en 1908, pour y faire « l’œuvre de sa vie », il devait en sortir, quelques années plus tard, sans avoir vu se réaliser un seul article de son programme, las, découragé, jetant le manche après la cognée… — Aura-t-il au moins été plus heureux dans la lutte acharnée et de tous les instants que, depuis son retour à la politique fédérale, il n’a cessé de livrer à son vieil adversaire, l’impérialisme ? Hélas ! non-seulement l’impérialisme a triomphé, mais encore il a eu, dans le triomphe, cette satisfaction, à coup sûr inespérée, de voir pencher de son côté, sur un point au moins et non des moindres, jusqu’à l’inflexible M. Bourassa lui-même. Ce fut lorsque le chef nationaliste, cédant, dès les premières semaines de la guerre, à l’affolement général, se crut tenu d’approuver, lui aussi, l’envoi de trou-