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ŒUVRES DE FONTANES.

ses talents. Le bruit de ses nombreux triomphes se répandit dans toute la France. Il eut une foule d’imitateurs. Les défauts du modèle devinrent plus remarquables dans ses copistes ; et sa réputation s’en affaiblit. C’est précisément ce qui était arrivé au plus fameux des rhéteurs latins. Sénèque, dit Quintilien plaisait à ses admirateurs par les vices de son style. Chacun s’efforçait de les imiter, et déshonorait son maître, en se vantant de parler comme lui[1].

Thomas eut plus d’un rapport avec Sénèque ; il vit aussi s’élever peu de temps après lui un homme dont le goût fut bien meilleur que le sien. Le Cours de Littérature, comme on l’a dit ailleurs, parut chez les Français à la même époque que le livre des Institutions chez les Romains. L’auteur de ce cours fut, comme Quintilien, orateur avant d’être critique : discours, si on les comparez ceux de Thomas, n’ont pas le même appareil ; on y trouve moins de cette dignité qui cherche l’admiration ; ils supposent des études moins vastes et des veilles moins laborieuses. L’esprit n’y a pas combiné tant d’effets, et multiplié tant de pensées ; mais le ton en est plus vrai, la marche plus heureuse, et la variété du style y répond mieux à celle des sujets.

Ce dernier orateur n’a point peint la simplicité guerrière de Catinat, comme les grâces de ce Féne-

  1. Sed placebat propter sola vitia, et ad ea se quisque dirigebat effingenda quæ poterat : deinde, cum se jactaret eodem mada dicere, Senecam infabamat. (Quintilien, liv. x, chap. I.)