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immobile ». Puis si, auprès des incomparables coloristes Leconte de Liste et Hérédia, M. Sully Prudhomme manie de médiocres palettes, souvenons-nous que beaucoup de ses pièces, chœur de blanches draperies, prolongent les méditations du Bois sacre de Puvis de Chavannes, et que parfois leur clair obscur s’illumine presque des insondables lumières Léonardesques ; car c’est ceci, — et probablement autre chose, — que me signifiait, après la lecture du Zénith, une très délicate artiste : « On dirait des vers de Vinci… » Intelligibilité sensibilisée, identité du sentiment et de la raison qui, dans La Cène à Milan, attirez d’abord par nul éclair et puis si magiquement éblouissez, combien faut-il vous méditer pour savoir écrire :

L’Aube est d’Angelico la sieur chaste et divine :
Raphaël est baisé par la Grâce à genoux :
Léonard la contemple et pensif la devine.

(Le Bonheur.)

Le Poète capable de telles sensations divinatrices n’est point sans affinités avec le Goethe qui, seul dans le romantisme, comprit, consacra et sauva les rythmes immortels. « Connais ta tâche et fais-la, cette significative parole du grand Wilhem Meister épigraphierait bien Que sais-je. Mais surtout M. Sully Prudhomme évoque fraternellement Vauvenargues, cet artiste-penseur dont on pourrait dire qu’avec Rousseau et Diderot, il