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réat ès-lettres, il subit, — malgré qu’il eut dès quinze ans étudié bien des philosophes, — une profonde crise de religiosité, jusqu’à vivre de longues heures de contemplation et projeter même une vocation monastique : rappelé à Paris, il fut repris à jamais par le Doute. Sa famille l’exhortant vivement à quelque situation pratique, il entra aux usines du Creusot contre son souhait d’une vie exclusive de pensée et de poésie, car au collège il s’était éveillé Poète ; vite sa nouvelle position qui, très modeste, pouvait devenir fort lucrative, le témoigna un pitoyable employé, tant réellement en lui rien n’était adapté aux affaires.

Alors il revint près de ses parents faire son droit et fut en même temps chez un notaire un clerc amateur très régulier ; mais les nuits, il ne cessait des travaux délicieux pour son esprit, excessifs pour sa santé : sans une chambre personnelle dans l’étroit appartement familial de la rue de Hauteville, il couchait sur le canapé du salon et, loin qu’il y dormit, il lisait pêle-mêle savants, philosophes, poètes, et surtout il écrivait des vers. Bientôt lié à quelques jeunes lettrés, présenté à Lecomte de Lisle, il s’efforçait à délaisser pour une forme plus vraiment poétique, la forme oratoire manifestée dans ses Poèmes alors inédits et ainsi s’imposa-t-il de composer de courtes pièces à cet instant où meurtrissant son