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mon sillon.

nerres lointains, éclatait ; quand le soleil couchant me jetait ses splendeurs ; quand le vent, les arbres et l’eau avaient leurs solennels murmures, je me blottissais contre les haies ou je restais debout dans la lande et je finissais par tomber à genoux sous le choc d’une émotion puissante, éprouvant impérieusement le besoin d’adorer le Créateur de ces merveilles. Mon rêve, ces deux années furent un rêve, mon rêve finit. La vie réelle me saisit entre ses bras de fer, et mes divins élans et ma pauvre poésie furent momentanément étouffés sous ses étreintes, mais je gardai tout au fond de mon être ces purs, ces délicats souvenirs et un jour vint où je dus y rafraîchir, ma pensée. »

Ce chant printanier ne te rappelle-t-il pas notre propre enfance, mon cher René. Pour moi, je me retrouve quelque peu dans cette petite fille sauvage et rêveuse dont l’âme frissonne sous le premier appel de l’idéal, sous la première touche de la grâce. Seulement je n’étais pas, il faut bien le dire, ni aussi poétique, ni aussi hardie et je n’étais pas abandonnée. J’avais un compagnon, un fort et joyeux garçon, qui avait l’air de commander et qui souvent obéissait. Mais ne