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mouvements, si tu veux avoir de belles manières. Rappelle-toi leurs discours, et, en quelque lieu que tu te trouves, à la campagne, en visite, en soirée, dans un dîner ou au spectacle, tu pourras jacasser hardiment sur la nature, la littérature, les enfants aux têtes blondes, l’idéal, le turf, et autres choses. La clef, Couturine ?

Il remonte les deux automates à la poitrine.

Commençons. En appuyant ici, on obtient ce qu’il faut dire devant un beau paysage.

En prenant le monsieur sous les aisselles, il le penche de droite et de gauche, comme on fait à une pendule dont le balancier est arrêté. Couturine fait de même à la dame.

Partez !

Le monsieur, avec de petits gestes rapides
de la main droite et l’air guilleret.

Bonjour, chère !

La dame, même jeu.

Bonjour, bonjour, mon bon !

Ils se rapprochent ainsi des deux côtés de la scène, en roulant sur leurs roulettes, et quand ils sont arrivés face à face, ils se secouent les mains pendant une minute avec violence, en ricanant.

Le monsieur, regardant autour de lui,
avec des mouvements de tête saccadés.

Tiens ! tiens ! tiens ! où sommes-nous donc ?

La dame, minaudant et en détachant ses phrases.

Ah ! la délicieuse campagne !… un site pittoresque !… et des petites fleurs ! — si poétiques ! — et inutiles !… poétiques parce qu’elles sont inutiles, — inutiles parce qu’elles sont poétiques !

Le monsieur, d’un ton bourru.

Moi… je la trouve bête comme chou… votre cam-