Page:Flaubert - Salammbô.djvu/405

Cette page a été validée par deux contributeurs.

jaune ou noire, en poussant des cris d’oiseau, en se tordant comme des vipères ; ou bien, au son des flûtes, elles tournaient pour imiter la danse des étoiles, et leurs vêtements légers envoyaient dans les rues des bouffées de senteurs molles. On applaudissait parmi ces femmes les Kedeschim aux paupières peintes, symbolisant l’hermaphrodisme de la Divinité ; et, parfumés et vêtus comme elles, ils leur ressemblaient malgré leurs seins plats et leurs hanches plus étroites. D’ailleurs le principe femelle, ce jour-là, dominait, confondait tout ; une lasciveté mystique circulait dans l’air pesant ; déjà les flambeaux s’allumaient au fond des bois sacrés ; il devait y avoir pendant la nuit une grande prostitution ; trois vaisseaux avaient amené de la Sicile des courtisanes et il en était venu du désert.

Les collèges, à mesure qu’ils arrivaient, se rangeaient dans les cours du temple, sur les galeries extérieures et le long des doubles escaliers qui montaient contre les murailles, en se rapprochant par le haut. Des files de robes blanches apparaissaient entre les colonnades, et l’architecture se peuplait de statues humaines, immobiles comme les statues de pierre.

Puis survinrent les maîtres des finances, les gouverneurs des provinces et tous les Riches. Il se fit en bas un large tumulte. Des rues avoisinantes la foule se dégorgeait, des hiérodoules la repoussaient à coups de bâtons ; et au milieu des Anciens, couronnés de tiares d’or, sur une litière que surmontait un dais de pourpre, on aperçut Salammbô.

Alors s’éleva un immense cri ; les cymbales et