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lons en blouse poussant leur cri sonore du haut de leur siège ; ils penseront à la rotonde et à l’impériale, aux relais de la poste où les chevaux crottés et fumants s’attachent, en arrivant, aux anneaux de la muraille, comme nous rêvons, nous autres, aux anciennes nuitées dans les auberges, avec les méprises de lits, les chandelles soufflées dans les corridors, le vacarme des servantes, l’hôte qui jure, l’hôtesse qui crie. Où sont maintenant les histoires de carrosses embourbés et des grandes dames à falbalas qui versaient dans les fondrières, en se rendant dans leurs châteaux ? Est-ce que ce seul mot, le coche d’Auxerre, ne nous fait pas penser à M. de Pourceaugnac débarquant à Paris avec ses hauts-de-chausses trop courts, son habit du règne passé et son accent limousin ? Aurions-nous les charmantes pages de Chapelle et de Bachaumont si, au lieu de s’en aller de province en province, portés dans les lourdes voitures de leurs amis MM. les gouverneurs et les fermiers, ils eussent été entraînés sur un chemin de fer ou dans un bateau à vapeur ?

Tout ce que nous avons donc remarqué de Paris à Blois, c’est que la route, quelque peu qu’elle ait duré, dura trop encore, agacés que nous sommes toujours de ce mode aride de locomotion et fort ennuyés, d’ailleurs, par la société de deux marchands de grains, grands parleurs, grands rieurs, gens enrichis probablement et fort satisfaits d’eux-mêmes. L’un décoré, jovial, gros, gras, lèvres épaisses, fort d’encolure et de voix