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façon puissante, des têtes songeuses, des airs rustiques et solennels ; mais ces fronts hâlés, découverts, ces solides épaules qui s’inclinaient, ces mains grises comme le manche des charrues et qui restaient oisives, et même les lourdes chaussures que le respect rendait légères, toute cette rudesse tournée en grâce, cette force devenant douceur à son insu avait un grandiose singulièrement doux, presque attendrissant à force d’être naïf. Ils étaient beaux ces hommes, beaux parce qu’ils étaient vrais et dans la simplicité de leurs costumes faits à leur taille, aptes à leurs corps, pliés selon le travail de leur vie, et dans la bonne foi de leur croyance qui s’exhalait à l’aise dans cette église faite pour elle, restes derniers d’une nationalité complète qui s’efface sans métamorphoses et disparaît sans transition, ainsi que les feuilles de l’if qui tombent sans jaunir. Avec leur costume d’autrefois, leur antique visage et cette religion de leurs ancêtres ils exhibaient ainsi les générations antérieures et semblaient à eux seuls représenter toute leur race. C’est pour cela peut-être qu’ils avaient l’air si pleins, et que chacun d’eux paraissait porter en lui plus de choses qu’il n’y en a ordinairement dans un homme.

Sous l’église romane se trouve la crypte romane.

Ce souterrain quadrilatéral au lieu de voûte est couvert d’un plafond plat, dallé comme le sol et supporté par quatre rangs de colonnettes soudées ensemble qui se séparent aux deux tiers de leur