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Aqueduc de Djesaher-Pacha, que nous voyons à El-Maya ; il traverse le paysage. Nous l’avions passé quelque temps auparavant, il était couvert de verdure et disparaissait dessous. Rien n’est joli comme la campagne vue dans l’encadrement d’une arche d’un de ces ponts ou d’un aqueduc, surtout quand passent dessous des chameaux ou des mulets.

Saint-Jean-d’Acre, de loin un carré long avec une tour à chaque bout. La ville me semble, à l’arrivée, un bazar animé ; marchand de sherbet et de boissons froides, avec un morceau de neige sur un pic en fer. — Khan sale et abandonné, où nous déposons nos bagages. — Nous dînons dans un cabaret, avec une ratatouille où il y avait des tomates, et que nous dévorons à pleines mains en buvant du sherbet à la neige qui sent le raisin, la rose et la mélasse. — Espèce de canaille grisonnante, à accent anglais, qui nous fait des questions de gendarmes. — Couchés près de la vasque vide du khan, sur nos lits, sous un saule où brûle suspendue une mèche dans un verre d’huile, elle éclaire le feuillage sur ma tête.

Saint-Jean-d’Acre, désolé, vide, maisons en pierres comme dans les autres petites villes. On y pense à des engagements de croisés dans les rues. La ville est pleine de ces Bédouins, leurs tas de blé encombrent une cour qui ferme sur la mer : c’est l’entrée du port qui n’existe pas. La rade est fort grande, mais c’est plutôt à Caïffa que l’on pourrait en faire un. — Deux tombes d’officiers anglais au milieu de la ville ; pourquoi ne pas les avoir mises au cimetière turc ? c’est d’une vanité triste. — Tombes antiques, l’une couronnée d’une