dénoncé, avec l’hystérie romantique, la vanité du Désir. Toutes les choses du monde sont plus ou moins désirables, mais toutes sont également vaines. Flaubert aboutit par là à un nihilisme moral qui embrasse non seulement toutes les passions, mais toutes les formes de l’activiténhumaine, aussi bien les plus désintéressées que les plus égoïstes : duperie, la recherche de la gloire ; duperie, le dévouement ; duperie, la vertu ; duperie, la sainteté même ! Le bouddhisme, dans les pires excès de son ataraxie, n’a jamais été si loin !…
On sait comment il se résigna, comment il accepta de tourner, sans illusions, « la meule de la vie ». Mais ce que l’on sait moins, ce que l’on comprendra mieux en lisant les pages qui vont suivre, c’est qu’à l’exemple de son saint bien-aimé, il chercha souvent une consolation et une volupté étrange à caresser en esprit les tentations, même jugées décevantes et coupables. Les casuistes et les théologiens ont donné à cette manie le nom de delectatio morosa. Se complaire à l’évocation insistante et vaine de plaisirs illusoires, c’est le péché intellectuel dans toute sa malice, — c’est se courber amoureusement sur le vide sans fond, avec la pleine conscience que c’est le vide. Le vertige vous gagne, l’âme défaillante sombre dans la désespérance, — et c’est une incurable folie ! À peine