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vers le garde champêtre, qui déplorait avec le capitaine l’insuffisance de Girbal et la mauvaise tenue de ses hommes.

Des ouvriers passèrent sur la route, en chantant la Marseillaise. Gorju, au milieu d’eux, brandissait une canne ; Petit les escortait, l’œil animé.

— Je n’aime pas cela ! dit Marescot, on vocifère, on s’exalte !

— Eh ! bon Dieu, reprit Coulon, il faut que jeunesse s’amuse !

Foureau soupira :

— Drôle d’amusement ! et puis la guillotine au bout.

Il avait des visions d’échafaud, s’attendait à des horreurs.

Chavignolles reçut le contre-coup des agitations de Paris. Les bourgeois s’abonnèrent à des journaux. Le matin, on s’encombrait au bureau de la poste, et la directrice ne s’en fût pas tirée sans le capitaine, qui l’aidait quelquefois. Ensuite, on restait sur la place, à causer.

La première discussion violente eut pour objet la Pologne.

Heurtaux et Bouvard demandaient qu’on la délivrât.

M. de Faverges pensait autrement :

— De quel droit irions-nous là-bas ? C’était déchaîner l’Europe contre nous ! Pas d’imprudence !

Et tout le monde l’approuvant, les deux Polonais se turent.

Une autre fois, Vaucorbeil défendit les circulaires de Ledru-Rollin.

Foureau riposta par les 45 centimes.