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DE GUSTAVE FLAUBERT.

Alors perplexité de mes bonshommes. Mais il y a de belles falaises plus loin. Ils s’y rendent. Une falaise très haute, solide. Ici le dialogue commence et ils arrivent à parler de la fin probable du monde due à un cataclysme (système de Cuvier, dont ils sont imbus). Peu à peu (pendant ce temps-là ils marchent) Pécuchet arrive a accumuler les preuves. Des cailloux déboulent de la falaise ; Bouvard est pris de peur et court. Il est à cent pas en avant de Pécuchet, seul ; il s’exalte, croit que le monde va crouler, hallucination, et il continue sa course furieusement. Pécuchet vient après en lui criant : « La période n’est pas accomplie », mais la falaise fait un coude. Bouvard disparaît. Arrivé à ce coude, Pécuchet regarde au loin : pas de Bouvard. Une valleuse se présente. Bouvard a dû la prendre ? Pécuchet s’y engage, monte un peu, ne voit personne et pense à redescendre. Mais il se dit que la marée l’empêchera de passer, car elle bat presque son plein. À quoi bon d’ailleurs ? et il continue a monter ; mais le sentier est terrible : vertige. Il se met à quatre pattes et arrive enfin en haut où il retrouve Bouvard, arrivé sur le plateau par un autre chemin plus facile. Plus de détails me gêneraient.

Vous comprenez maintenant que la courtine, son tunnel, la manne-porte, l’aiguille, etc., tout cela me prendrait trop de place. Ce sont des détails trop locaux. Il me faut rester autant que possible dans une falaise normande en général. Et j’ai deux terreurs : peur de la fin du monde (Bouvard), venette personnelle (Pécuchet) ; la première causée par une masse qui pend sur vous, la seconde par un abîme béant en dessous.