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DE GUSTAVE FLAUBERT.

l’année dernière ; puis cette année. L’époque des étrennes aura fini, que le livre ne sera pas prêt. Notez que votre légitime m’avait juré ses grands dieux du contraire, c’est-à-dire que nous paraîtrions au plus tard le jour de l’an de 1879 !

Je lui avais montré et moi-même apporté le dessin en question, celui du vitrail de la cathédrale de Rouen, auquel la dernière ligne de Saint Julien renvoie le lecteur. Ce n’était pas bien difficile à découvrir.

Enfin, je ne vous cache pas que ce retard m’embête, « si l’on peut s’exprimer ainsi ». J’ignore si je récolte des lauriers, mais le côté truffes manque de plus en plus dans ma carrière. Ernest Daudet s’était proposé de me placer avantageusement un vieil ours le Château des cœurs. Dalloz apparemment n’en veut pas, car il fait la sourde oreille. Bref, on me traite tout à fait en grand homme, on me méprise. Il faut être un joli maniaque pour continuer à travailler avec des encouragements pareils.

Voilà quatre ans que je suis sur mon livre ! Il m’en demandera encore deux. Je me crois dénué d’envie et de cupidité, Dieu merci ! En de certains jours pourtant, ce qui me reste à vivre ne m’apparaît point couleur de rose.

Pourquoi, diable, est-ce que je vous dis tout cela ? C’est que je vous regarde comme un ami.

Tout en vous considérant comme une belle dame dont je baise les deux mains.

Vôtre.

Deux bécots de nourrice sur les joues de Georgette.