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DE GUSTAVE FLAUBERT

1045. À SA NIÈCE CAROLINE.
Paris, mercredi matin [4 août 1869].

Quelle bonne lettre gentille et charmante, ma chère Caro ! Sais-tu que tu me flattes en me disant tant de bien de mon roman ?

Quant à notre pauvre vieille, elle est si contente de vivre avec toi que je t’engage à ne pas lui faire remarquer l’exiguïté de sa chambre. Arrangez votre hôtel ; puis, quand tout sera prêt, tu lui montrera sa chambre. Elle la trouvera bien quand même. D’ailleurs, elle s’y tiendra seule fort peu. L’idée que ton atelier est contigu à cette pièce la charmera ; si tu lui faisais là-dessus quelque observation, sa tête se remettrait à travailler : vous lui offrez ce que vous avez, vous ne pouvez rien de plus.

Je vais passer mon après-midi au ministère d’État pour Aïssé, et ce soir j’aurai ma première épreuve.

Mes ouvriers de la rue Murillo m’embêtent ; il m’a fallu du génie pour l’arrangement de mes meubles.

Vous finirez par vous tuer en voiture. Prenez garde, vous êtes sur une pente. Tu ne saurais croire, mon Carolo, comme je m’ennuie de toi. Depuis que je n’ai plus mon pauvre Bouilhet, dont l’image m’obsède, je crois que je t’aime encore plus qu’auparavant.

Dès que j’aurai un peu de liberté, j’irai à Neuville tout bonnement pour te voir et te bécoter.

Ton Vieux.