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CORRESPONDANCE

Je me disais : elle est partie vers la nouvelle Athènes avec des nourrissons de Mars ! Ils ont les cuisses serrées dans un brillant azur, et moi je suis couvert d’habits rustiques ! Un glaive reluit à leur flanc ; je ne puis montrer que des plumes ! Des panaches ornent leur tête ; à peine si j’ai des cheveux !…

Car les soins, l’étude, m’ont ravi cette couronne de la jeunesse, cette forêt qu’épile sur nos fronts la main du temps destructeur.

C’est ainsi, ô belle dame, que la jalousie la plus noire se tordait dans mon sein !

Mais votre missive, grâces aux dieux, m’est arrivée tantôt comme une brise rafraîchissante, comme un véritable dictame !

Que n’ai-je la certitude, au moins, de vous voir prochainement établie au milieu de nos guérets, fixée sur nos bords ! La rigueur des autans qui s’approchent serait adoucie par votre présence.

Quant à l’horizon politique, vos inquiétudes peut-être dépassent-elles la mesure. Il faut espérer que notre grand historien national va clore, pour un moment, l’ère des révolutions ! Puissions-nous voir les portes du temple de Janus à jamais fermées ! Tel est le souhait de mon cœur, ami des arts et d’une douce gaieté.

Ah ! si tous les mortels, fuyant la pompe des cours et les agitations du forum, écoutaient la simple voix de la nature, il n’y aurait ici-bas que concorde, danses de bergères, entrelacements sous les feuillages ! d’un côté… de l’autre… ici… là ! Mais je m’emporte.

Madame votre mère se livre toujours aux occu-