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DE GUSTAVE FLAUBERT.

l’amitié de Thiers et de Rouher (sic), etc., etc.

La politique peut devenir une science positive. (La guerre l’est bien devenue !) Mais ceux qui s’en mêlent prennent un chemin tout opposé à celui de la Science. Jamais de doute ! Jamais d’examen ! Toujours l’invective ! Toujours la passion !

Quel résultat espérez-vous en frappant non sur vos ennemis, mais à côté ? Observez donc les nuances ! Dans les nuances seules est la Vérité.

Et puis, ne voyez-vous pas que vous flattez dans le Bourgeois ce qui vous horripile chez le Démocrate ? je veux dire le petit péché capital appelé Envie.

L’Envie va démolir Thiers. Dans quinze jours ce sera un rouge ! Il aura le sort de Lamartine et de Cavaignac ! D’avance, j’entends ces phrases : « Laissez-moi avec votre Thiers ! C’est un des leurs tout de même. Il a écrit un livre sur la Révolution ! C’est lui qui a fait les fortifications qui sont cause… ! »

Au lieu de la canaille des villes, vous aurez celle des campagnes ! Débarrassés de la Commune, vous jouirez de la Paroisse !

Et le Comité Taillet ne vous sauvera pas ! Malgré le style de son président, car l’oraison funèbre du père Chassan[1] est un morceau, avouons-le ! Là, au moins, pas de sonorités, pas de métaphores ! et ça ne rapporte aucune espèce de rentes !

En un mot, mon cher Lapierre, je suis épouvanté par la Réaction qui s’avance. Sans vous en

  1. Ancien avocat général à Rouen.