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CORRESPONDANCE

Ce qui me fait croire au siège prochain de Paris, c’est que l’ennemi se refoule (ou est refoulé) vers la Brie ; que la Nièvre et le Loiret sont en état de siège, et qu’on s’est mis à refortifier Paris dès le lendemain de nos revers. Mais, avant le siège, il y aura, sous les murs de cette bonne Lutèce, une bataille décisive. Souhaitons qu’elle ait lieu plus loin. Aucune révélation des Nogentais.

Adieu, chère Caro ! Bon courage ! Moi, j’en ai maintenant plus que la semaine dernière.

Je t’embrasse très fort.


1121. À SA NIÈCE CAROLINE.
Croisset, mercredi, 5 heures [31 août 1870].
Mon pauvre Caro,

Les Bonenfant m’ont l’air fort heureux d’être loin du « théâtre de la guerre. »[1]. Leurs petites filles ne sont pas agaçantes, mais ce pauvre Bonenfant a des crachements continuels ! Croirais-tu que, de mon lit, je l’entends dans le jardin. C’est là ce qui me réveille, le matin, avec les disputes de Hyacinthe[2] et de ta grand’mère.

Je t’assure, mon Carolo, que je n’en peux plus ! Si une vie pareille devait se prolonger, je deviendrais fou ou idiot. J’ai des crampes d’estomac avec un mal de tête permanent. Songe que

  1. Ils venaient d’arriver à Croisset, craignant l’arrivée des Prussiens à Nogent-sur-Seine.
  2. Femme de chambre.