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CORRESPONDANCE

La Rounat effrayé… Narcisse au quinzième plan !… J’entends gronder les vers et les applaudissements partir. Tableau. Serai-je rouge, moi ! quelle coloration ! et comme ma cravate me gênera !…

Quant à la Bovary (que j’oublie quelque peu, grâce au ciel, entre ta pièce qui s’avance et Saint Antoine qui se termine), j’ai reçu de Maxime un mot où il me prévient que ça paraîtra « le 1er octobre sans faute, j’espère ». Ce j’espère m’a l’air gros de réticences. En tout cas son billet est un acte de politesse, il m’est arrivé juste le 1er septembre, jour où je devais paraître. Je vais lui répondre cette semaine en lui rappelant modestement que voilà déjà cinq mois de retard… rien que ça ! Depuis cinq mois, je fais antichambre dans la boutique de ces messieurs. Je suis sûr que l’ami Pichat voudrait me pousser encore quelques-unes de ses intelligentes corrections.

J’ai reçu hier une lettre de mon vénérable père Maurice [Schlésinger] où il m’annonce le mariage de sa fille avec un architecte de Stuttgart, grand artiste, fort riche. Superbe affaire, joie générale, et il m’invite à la noce. Ma pénurie me forcera à inventer une blague quelconque, ce que je regrette fort. Le sentimental et le grotesque me conviaient à ce petit voyage. Aurais-je bu ! et aurais-je rêvé à ma jeunesse ! Ce mariage d’une enfant que j’ai connue à quatre mois m’a mis hier un siècle sur les épaules. J’en ai été si triste que je n’ai pu rien faire de la journée ; le manque d’argent y était aussi pour beaucoup. J’ai déjà refusé d’aller passer un mois à Toulon chez Cloquet pour les mêmes motifs. Depuis le mois de juillet, j’ai payé quatre mille francs, et j’aime