Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 3.djvu/419

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
413
DE GUSTAVE FLAUBERT.

celle de Gagne. Où est-elle ? Il est vrai que je ne l’ai point cherchée. Les tiennes, cher amour, emplissent tout un carton. Elles sont à part avec les petits objets qui viennent de toi. J’ai revu la branche verte qui était sur ton chapeau à notre premier voyage à Mantes, les pantoufles du premier soir et un mouchoir à moi, […]. J’ai bien envie de t’embrasser ce soir. Je mets mes lèvres sur les tiennes et je t’étreins du plus profond de moi-même, et partout. À la fin du mois prochain nous nous reverrons ! Voici une année qui vient. À l’autre jour de l’an, si je ne suis pas encore à Paris, j’y aurai du moins mon logement, car je vois qu’il faudra s’y prendre de bonne heure à cause de l’Exposition. Du reste, la Bovary avance. La […] est faite et je la laisse, parce que je commence à faire des bêtises. Il faut savoir s’arrêter dans les corrections, d’autant qu’on ne voit pas bien les proportions d’un passage quand on est resté dessus trop longtemps. J’attends Bouilhet avec anxiété pour lui lire ce qu’il ne connaît pas. Sa dernière lettre était des plus tristes. Ce que j’avais prévu arrive, Paris l’assombrit. Mais je m’en vais tâcher de lui remonter le moral, comme dirait mon pharmacien. À l’heure qu’il est, il doit être arrivé à Rouen et se livrer avec Léonie à des […] violents et réitérés, à moins que la Sylphide ne lui ait pris tout son suc.

Rien n’est plus vrai que tout ce que tu dis dans ta dernière lettre sur les femmes qui viennent chez toi. Sois sûre qu’elles sont toutes jalouses de ta personne et qu’au fond la Sylphide t’exècre. Cela est dans l’ordre. Elle fera tout son possible pour te brouiller avec Bouilhet. Les femmes ne veulent