Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 3.djvu/243

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
237
DE GUSTAVE FLAUBERT.

couardise, va lasser Delisle. Celui-ci finira par s’embêter de tout cela et quittera la partie, et « le Jeune irrité » (tout Sainte-Beuve est dans ce mot) n’aura eu en définitive ni épée dans la bedaine, ni coup de pied au cul, et il recommencera en sourdine ses machinations, comme dirait Homais.

Tu t’étonnes d’être en butte à tant de calomnies, d’attaques, d’indifférence, de mauvais vouloir. Plus tu feras bien, plus tu en auras. C’est là la récompense du bon et du beau. On peut calculer la valeur d’un homme d’après le nombre de ses ennemis et l’importance d’une œuvre au mal qu’on en dit. Les critiques sont comme les puces, qui vont toujours sauter sur le linge blanc et adorent les dentelles. Ce blâme envoyé par Sainte-Beuve à la Paysanne me confirmerait plus dans l’excellence de la Paysanne que les éloges du grand Hugo. On donne des éloges à tout le monde, mais le blâme, non. Qu’est-ce qui a jamais fait la parodie du médiocre ?

À propos de Hugo, je ne crois pas qu’il soit temps de lui écrire. Tu as mis à lui répondre un mois. Notre paquet est parti il n’y a pas quinze jours. Il faut au moins encore attendre autant. Pourvu qu’on ne l’ait pas saisi ! Toutes les précautions ont été prises pourtant. Ma mère a écrit l’adresse elle-même.

Qu’est-ce que veut donc dire cette phrase dans ta lettre de ce matin, en parlant de Delisle : « Je crois que je m’étais trompée sur mon impression d’hier » ? Les mots des bourgeois de Chartres à Préault sont bons. T’ai-je dit celui d’un curé de Trouville, auprès de qui je dînais un jour ? Comme