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CORRESPONDANCE

public ! Il y a des moments où, quand j’y songe, j’éprouve pour lui de ces haines immenses et impuissantes, comme lorsque Marie-Antoinette a vu envahir les Tuileries. Mais causons d’autre chose.

La pièce à propos du volume de Musset est bonne, insolente, troussée, un peu longue seulement, surtout (et rien que là) vers la fin. Si tu pouvais la condenser un peu (chose facile à toi qui n’es pas un prime-sautier), ce serait parfait. Mais quelque chose de bien beau, cher vieux, c’est la pièce À un monsieur[1] ; c’est fort. Ce n’est pas pour te dire une malhonnêteté, comme on m’en a dit toute ma vie, sur ma figure, en me trouvant des ressemblances avec tout le monde, mais c’est étrange comme ça m’a rappelé Alfred. Ne trouves-tu pas ?


262. À LOUIS BOUILHET.
Alexandrie, 5 juillet [1850].

C’est fini, j’ai dit adieu au Caire, c’est-à-dire à l’Égypte. Pauvre Caire ! comme il était beau la dernière fois que j’ai humé la nuit sous ses arbres ! Alexandrie m’ennuie. C’est plein d’Européens, on ne voit que bottes et chapeaux ; il me semble que je suis à la porte de Paris, moins Paris. Enfin dans quelques jours la Syrie, et là nous allons nous mettre le derrière sur la selle et pour longtemps. Nous serons enfourchés dans les grandes bottes et nous galoperons poitrine au vent.

Je te remercie, cher vieux, des cadeaux qui

  1. À un jeune homme, dans Festons et Astragales.