Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/632

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le célèbre théologien, n’ayant pas ici les mêmes préoccupations que celles d’auparavant, ne cherche aucunement à contredire la tradition ; il voit, sans hésitation, dans les Africains asservis et non dans les Chanaans, les fils de Cham sur lesquels s’est accomplie et s’accomplit encore la malédiction de Noé. C’est peut-être un fait digne d’attention que le sans-gêne avec lequel les hommes d’Église disent oui et non sur un même fait, dans le même ouvrage. Mais la parole de Dieu ne saurait avoir été prononcée en vain ; il a donc fallu prouver que la prédiction de Noé, faite dans une forme tellement précise et saisissante, s’est réalisée et se réalise encore. Sans cela, la Bible, qui est la source de toutes les doctrines chrétiennes, perdrait toute son autorité et n’exercerait plus le prestige qu’elle doit avoir sur l’intelligence du fidèle, comme la vérité révélée par Dieu, au moyen de l’inspiration accordée à Moïse, aux prophètes et aux apôtres.

Au reste, il faut répéter que c’est la dernière interprétation qui a été la plus généralement acceptée. « Noa’h, dit

    ques le ch est un signe d’aspiration, comme il en est parfois en allemand et en grec. En rapprochant Cham qui, en hébreu, signifie « le brûlé » de Chamosch ou Chemesch, (soleil) du phénicien Hamon, signifiant aussi soleil, on trouve assez facilement la raison d’être de l’opinion qui fait de Hammon une divinité solaire et chamitique. Chamitique et éthiopigue sont les formes sémitiques et grecques du même mot, désignant les hommes brûlés par le soleil, c’est-à-dire bronzés ou noirs.

    D’autre part, je sais que la plupart des égyptologues voient dans Ammon la forme grecque de Amoun, mot égyptien qui signifie inconnu, mystérieux, caché*, ou bien mystère, adoration** ; mais j’aime mieux adopter un sens étymologique qui s’accorde parfaitement avec l’esprit de la race et de la civilisation des anciens Égyptiens, ainsi que des peuples qui subissaient leur influence. En acceptant que les idées métaphysiques que prêtent ces savants au culte d’Ammon aient été celles des grands prêtres et des initiés, le peuple a dû probablement ignorer ce sens profond et subtil.

    * Oll. Beauregard, Les divinités égyptiennes.

    ** Emm. de Rougé, Notice somm. des monum. égyptiens du Musée du Louvre.