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quelles on rend hommage alors même qu’on les élude ? Pour légitimer les prétentions européennes, il a bien fallu mettre en avant une raison qui les justifiàt. On n’a pu en imaginer une meilleure que celle qui s’appuie sur la doctrine de l’inégalité des races humaines. D’après les déductions tirées de cette doctrine, la race blanche, étant unanimement reconnue supérieure à toutes, les autres, a pour mission de dominer sur elles, car elle est seule capable de promouvoir et de maintenir la civilisation. Elle en est devenue le porte-étendard élu et consacré par les lois mêmes de la nature !

Cette doctrine est-elle née d’une inspiration purement platonique ? Nullement. Elle est le résultat du plus affreux égoïsme, usurpant le nom de la civilisation, adultérant les plus belles notions de la science, pour en faire les soutiens des convoitises matérielles, les moins respectables du monde. Les peuples européens, heureux d’être parvenus les premiers à un degré de développement qui leur garantit actuellement une supériorité incontestable sur le reste des nations, ne voient en dehors de l’Europe que des pays et des hommes à exploiter. Trouvant trop étroit le terrain où ils sont nés et doivent vivre, ils recherchent, avec une insatiable ardeur, des territoires plus vastes, où puissent se réaliser leurs rêves de déployer à l’infini leurs immenses ressources et d’augmenter de plus en plus leurs richesses, sans qu’aucune difficulté les vienne contrarier. Partout et chaque jour, se manifeste davantage en Europe cette soif de coloniser qui est devenue insensiblement la passion dominante de la politique. Cette aspiration grandissante à s’emparer de territoires étrangers, habités par des regnicoles qui ont possédé depuis une époque immémoriale la terre où sont plantées leurs tentes, où sont établies leurs huttes, terre mille fois sacrée pour eux, parce qu’elle contient le dépôt précieux des cendres de leurs pères, a