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produit les plus grands savants et les plus brillants artistes dont une race peut s’enorgueillir.

D’autre part, la race noire, après des siècles d’une décadence profonde, était tombée dans un état de complet abâtardissement. Au lieu de cette évolution progressive qui a conduit la race blanche à de si belles formes physiques et à une si grande puissance intellectuelle, il semblait que l’Éthiopien fût travaillé par une force toute contraire, l’attirant vers les formes primitives de l’espèce. Il faut avouer qu’un tel état de choses n’était pas fait pour donner les meilleurs éléments d’appréciation.

La race noire était, de plus, fort mal connue en Europe. Il est vrai que les grands voyages autour du monde, qui ont de mieux en mieux complété les notions géographiques, étaient en majeure partie exécutés. Mais on tombait, sans aucune préparation d’esprit, au milieu de peuples étrangers, différant des Européens tant par la coloration, par les traits du visage que par leurs mœurs sauvages ; on ignorait leurs langues et leurs habitudes. Tout fut donc un obstacle pour qu’on arrivât à les étudier rationnellement. Cette étude était d’autant plus impossible que les voyageurs, sans être des ignorants, étaient le plus souvent dénués de toutes les connaissances spéciales qu’il faudrait réunir pour la bien faire. Les savants qui étaient à même de voir des hommes noirs et de les étudier personnellement, ne les rencontraient que dans les colonies européennes, à l’état d’esclaves. Pouvait-on imaginer de plus mauvaises conditions ? Qu’on prenne la plus intelligente des nations de l’Europe moderne ; si, par un concours de circonstances difficiles à réaliser, on se la figure réduite en esclavage, avilie par un long régime de dégradation morale, éreintée, abrutie par un travail excessif, maltraitée à l’égal de bêtes de somme, croit-on qu’elle paraisse encore douée des aptitudes supérieures qui distinguent les hommes libres et