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Des saphirs à son col brillent, une basquine
Aux plus riches couleurs
Resserre élégamment sa taille svelte et fine ;
De Bejucal[1] les fleurs
Ornent sa chevelure ondoyante et soyeuse
Et des baisers ardents,
Venant s’épanouir sur sa lèvre rieuse,
Montrent ses blanches dents,

Dans la nature, tout les invite à la joie,
Au plaisir chaste et pur :
Le ciel qui dans l’éther impalpable déploie
Son éventail d’azur
Parsemé de fleurs d’or ; la brise qui soupire,
En effleurant les flots,
Et descend lentement sur la plage bruire
Ainsi que des grelots.

Sur le sein ingénu de Juanita s’incline
La tête de Carlo ;
La querida niña, sur une mandoline,
Chante un romancero.
Pleine d’émotion, sa voix claire et vibrante
S’envole vers les cieux,
Tout son être frissonne et son âme tremblante
Brille dans ses grands yeux.

Écoutant cette tendre et douce mélodie
S’égrenant dans la nuit
Comme un timbre de luth, de harpe d’Éolie
Que Zéphyr qui s’enfuit,
Racontant ses désirs aux fleurs, aux prés, aux grèves,
Fait vibrer tout joyeux,
Carlo bercé de joie et d’amour et de rêve,
Plonge son œil aux cieux.

Mais la lune, irisant la frange d’un nuage,
Se montre à l’horizon
Et répand sa clarté sur l’Océan sauvage
Et le soyeux gazon :
Tout à coup, des beaux doigts de la charmante fille
S’échappe l’instrument
Aux magiques accords, et son regard pétille
Plein de ravissement…

« Nuit sereine, dit-elle, ô nature sublime !
Voix immense de Dieu

  1. Village aux environs de la Havane.