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— Je voudrais savoir lequel de nous deux est le plus près de votre cœur ? Mademoiselle.

Elle voulut jouer sur les mots et badina.

— De vous ou de maman.

— Ne jouez pas la comédie, vous savez bien quel est cet autre dont je veux parler.

Elle balbutia interdite :

— Pourquoi voulez-vous me mettre à la torture ce soir ? Le moment est bien mal choisi.

Elle était devenue toute pâle. Sa mère revenait, ils se séparèrent. Pierrette alla s’asseoir sous le reflet d’un abat-jour rose, elle était séduisante au possible, au moindre de ses mouvements les diamants de son front étincelaient. Guy de Morais ne la quittait pas des yeux. Bientôt l’heure sonna de partir pour l’église. Le jeune homme commanda un taxi, bien que la distance fût minime, il craignait, dit-il, que Pierrette ne prît froid en cette nuit belle mais froide.

Les deux femmes prirent place au fond de la voiture, et Guy de Morais en face d’elles.

Pierrette avait enlevé ses diamants afin de coiffer son chapeau et Guy en était mécontent.

À l’église, il se tint très bien, Pierrette semblait de marbre, placée dans le banc entre sa mère et Guy de Morais, elle ne se tourna ni vers l’un ni vers l’autre ; les mains jointes, elle suivait attentivement l’office divin ; ses yeux cherchaient la crèche : il lui était resté de son enfance une très tendre dévotion envers Jésus-Enfant.

À la sortie, l’auto attendait : elle se pelotonnait frileuse tout près de sa mère. Elle se rappelait malgré elle les derniers Noëls, les Noëls anciens quand Charlie était avec elle. Et en foule, l’assaillaient les souvenirs heureux, les réminiscences, très douces, elle comparait intérieurement son esprit tiraillé et la douce quiétude qui marquait jadis cette belle fête.

Au réveillon elle fut silencieuse. Elle avait laissé Guy de Morais lui remettre le diadème. Sa tête en était couverte de scintillements. Un peu plus tard ils se di-