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nappe de cirrus fut observée à 4 500 mètres ; à 7 000 mètres la masse des cirrus était plus compacte ; on distinguait une petite portion de la surface terrestre qui formait comme la base d’un cylindre. Jusqu’à 7 000 mètres les aéronautes n’éprouvèrent pas d’inconvénients sérieux ; mais à 7 600 mètres ils étaient pâles, à l’altitude de 7 000 mètres ils respirèrent de l’oxygène qui leur fit beaucoup de bien.

Vers 7 500 mètres, une immobilité saisit les voyageurs, ils s’engourdissent ; M. Sivel vide alors ses trois sacs de lest. Le corps et l’esprit s’affaiblissaient peu à peu. À ces hauteurs, on ne souffre pas, on devient indifférent, on ne pense plus au danger, on est heureux de s’élever de plus en plus. Le vertige des hautes régions n’est donc pas un vain mot. Bientôt M. Sivel s’assit, comme l’était M. Crocé-Spinelli ; M. G. Tissandier s’appuya comme il put ; il devint très faible, sans pouvoir tourner la tête ; il ne pouvait lever les bras, pour saisir le tube et respirer l’oxygène. Son esprit avait conservé quelque lucidité, il lut la pression de 290 à 280 millimètres ; mais sa langue était paralysée.

À une heure trente minutes, il tombe inerte. À deux heures huit minutes, il se réveille et vide un sac de lest ; la pression était de 315 millimètres et l’altitude de 7 059 mètres ; il était alors deux heures vingt minutes. Il s’affaissa de nouveau ; le vent était violent. Crocé-Spinelli se réveille à son tour et jette du lest ; il lance par-dessus le bord l’aspirateur, qui pesait 17 kilogrammes. Le ballon, imperméable et très chaud, remonte encore. Aucun des trois aéronautes ne peut tirer la soupape pour redescendre, et M. Tissandier perd encore connaissance.

Ce ne fut qu’à trois heures trente minutes qu’il se ranima ; la hauteur était de 6 000 mètres. Ses compagnons avaient cessé de vivre. Leur visage était noir, ils avaient les yeux à demi fermés, la bouche entr’ouverte, ensanglantée et froide.

La descente eut lieu, avons-nous dit, à quatre heures, à 250 kilomètres de Paris, après un séjour de quatre heures vingt-cinq minutes dans les airs. M. Tissandier s’est assuré que le Zénith n’a pas dévié de sa route. Sa vitesse était plus considérable en haut qu’en bas. Les papiers jetés ont mis trente minutes pour descendre jusqu’à terre.

La boîte renfermant les tubes barométriques fut ouverte dans le laboratoire de la Sorbonne, huit jours après l’événement, pour connaître quelle était la hauteur maximum atteinte.

Ces tubes barométriques, qui ont été imaginés par M. Janssen, et construits en fer, ont 60 centimètres de long ; ils sont remplis de mercure et recourbés en bas. Sous l’influence de la dépression, le mercure s’échappe en gouttelettes, et, après le voyage, la quantité de mercure qui reste dans le tube permet de déterminer la pression correspondante. L’un de ces tubes était cassé, d’autres fonctionnaient mal, mais deux ont présenté une marche régulière. On a trouvé ainsi que la plus faible pression était de 264 à 260 millimètres, ce qui porte à 8 600 mètres la hauteur maximum à laquelle est parvenu le Zénith. M. Gaston Tissandier est persuadé que la hauteur de 8 600 mètres répond à la première montée, et que ses amis ont perdu la vie lorsque le ballon a atteint pour la deuxième fois les régions élevées.


Telles sont les observations scientifiques faites pendant cette funeste ascension. Elles sont de peu d’importance, on le voit. Peut-on espérer des résultats plus intéressants de nouvelles ascensions à grande hauteur ? Nous ne le croyons pas. On voudrait, dit-on, connaître la proportion de gaz acide carbonique qui existe dans l’air à 8 000 ou 9 000 mètres. Quelle est l’utilité de cette