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une expansion coloniale, pour créer un débouché nouveau aux innombrables produits de leurs manufactures.

La généralisation de l’emploi des machines et des machines-outils dans les ateliers, grands et petits, pour la fabrication des objets de toute sorte, — la disproportion permanente entre la vente et la production, — l’élévation des salaires, résultant de l’augmentation du prix de toutes choses, — les crises ouvrières qui en résultent, et qui éclatent en tous pays, — toutes ces victoires du travail, mêlées de déceptions sociales, tous ces triomphes de la science et de l’art, semés de craintes pour l’avenir, peuvent être attribués aux progrès réalisés par la machine à vapeur, depuis l’année 1870 jusqu’à l’heure actuelle.

Comment nos ingénieurs et nos constructeurs sont-ils parvenus à ce résultat extraordinaire, de produire, avec 750 grammes de houille, le même travail qu’on obtenait autrefois avec 4 kilogrammes du même combustible, dans les machines à vapeur ? C’est ce que nous allons étudier avec le lecteur.


Il est un principe, de démonstration récente, et qui peut être comparé, sous le rapport de son importance et de sa portée, aux plus grandes découvertes que l’histoire des sciences ait jamais enregistrées : nous voulons parler du principe de la conservation de l’énergie, mis en lumière par les travaux des Mayer, des Joule, des Hirn, etc., etc.

En vertu de ce principe, la lumière, l’électricité, la chaleur, la force, ne sont que des manifestations différentes de l’énergie. Si l’on considère plus particulièrement la chaleur et la force, on démontre facilement aujourd’hui qu’il y a équivalence entre la chaleur absorbée dans une machine à vapeur ou une machine thermique en général, et le travail mécanique produit par cette machine. En d’autres termes, une calorie donne toujours naissance à un travail mécanique égal à 425 kilogrammètres, et réciproquement, ce travail de 425 kilogrammètres peut régénérer une quantité de chaleur égale à une calorie.

L’idéal de la machine thermique, c’est-à-dire de la machine qui emprunte son effet à la chaleur seule, serait celle qui permettrait de recueillir ce travail de 425 kilogrammètres pour une calorie produite dans le foyer de la chaudière. Pouvons-nous espérer ce merveilleux résultat ? Hélas ! non, il s’en faut de beaucoup ; car nos machines à vapeur les plus perfectionnées ne peuvent utiliser plus de la sixième partie de la chaleur développée par la combustion du charbon dans le foyer.

Il ne faut pas, cependant, désespérer des ressources de la science et de l’art ; car nous venons de voir quelle économie énorme de charbon on fait actuellement dans les machines mues par la vapeur.

Examinons par quels moyens on est arrivé à se rapprocher du type idéal dont nous parlions tout à l’heure.

Pour avoir une machine à vapeur industriellement parfaite, il faut satisfaire à deux conditions :

1o Produire la plus grande quantité de vapeur possible avec un poids de charbon brûlé ;

2o Utiliser cette vapeur en lui faisant rendre tout le travail mécanique qu’elle peut donner.

Il faut, pour cela, posséder, d’une part, un moyen aussi avantageux que possible, de produire la vapeur, c’est-à-dire une chaudière irréprochable ; d’autre part, un mécanisme moteur parfait. Ce qui nous conduit à étudier successivement : 1o la chaudière à vapeur, 2o la machine motrice.