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raient se faire sans danger en même temps que le premier.

À l’aide des enclenchements, quel que soit le nombre des appareils et des mouvements, on peut toujours obtenir une sécurité absolue et mathématique, en multipliant suffisamment le nombre des leviers, à condition que la circulation ait lieu dans le sens normal en vue duquel les appareils ont été installés. Cette solidarité est si parfaite, que l’on a pu dire, d’une façon imagée et pittoresque, mais sans aucune exagération, qu’un aveugle entrant dans un poste d’aiguillage, renfermant deux cents leviers et plus même, comme il en existe à l’entrée de certaines grandes gares anglaises, pourrait manœuvrer au besoin tous les leviers, sans qu’il en pût résulter d’autre conséquence fâcheuse que l’arrêt de tous les trains.

L’origine des enclenchements remonte, en France, à 1854. C’est, en effet, à cette époque qu’un ingénieur de la Compagnie du chemin de fer du Nord, M. Vignier, imagina de relier les leviers des aiguilles de bifurcation avec ceux des disques d’arrêt, de manière à empêcher le croisement ou la convergence de deux trains de directions différentes.

En Angleterre, M. Saxby proposa, vers 1856, un premier système d’enclenchement, qui, depuis cette époque, n’a cessé d’être perfectionné. D’autres systèmes d’enclenchement, soit dérivés de ceux de Vignier et de M. Saxby, soit reposant sur un principe tout différent, comme celui de Rothmüller, ont été proposés et appliqués sur certains points ; mais le système actuellement employé par MM. Saxby et Farmer est le plus répandu aujourd’hui, non seulement en Angleterre, mais aussi sur le continent. Il est d’une précision rigoureuse et a l’immense avantage de permettre la réunion dans un seul poste d’un nombre de leviers qu’il serait impraticable de réunir avec les autres systèmes.

On compte 34 leviers dans le poste de Fives, sur le réseau du Nord. Le poste central de la gare de Cannon-street, à Londres, ne contient pas moins de 70 leviers ; celui de Waterloo-Bridge en a 109, et celui de London-Bridge en renferme 280, desservis par quatre agents en service simultané. On peut dire qu’il n’y a pas de limite au nombre des leviers de manœuvre dans un même poste.

Le principe du système Saxby et Farmer le rend, de plus, parfaitement applicable à tous les cas que peut présenter l’exploitation des chemins de fer, et qui peuvent varier avec les circonstances locales.


Tous les enclenchements, considérés d’une manière générale, peuvent se ramener à deux types généraux : 1o enclenchements mutuels de leviers concentrés en un point ; 2o enclenchements à distance de leviers disséminés.

Il peut être nécessaire, en effet, d’empêcher le signaleur de manœuvrer certains leviers sans l’autorisation expresse d’agents placés en d’autres points de la gare, lesquels doivent, par conséquent, pouvoir enclencher les leviers à distance.

Nous ne nous occuperons que des premiers de ces enclenchements ; ce qui revient à dire que nous ne donnerons la description que de l’enclenchement Vignier et des appareils actuels de MM. Saxby et Farmer.

Dans un poste Vignier, les leviers sont généralement disposés perpendiculairement aux voies, de part et d’autre de la guérite de l’aiguilleur. Les enclenchements sont établis en plein air et au niveau du sol, sur une plate-forme située en avant des leviers. Ceux-ci, qui sont à contrepoids ou à secteur, mettent en mouvement, indépendamment de la transmission destinée à manœuvrer les appareils, aiguilles ou signaux, des bielles, auxquelles ils communiquent un déplacement longitudinal.