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pagne cette description de réflexions que nous reproduisons, pour donner une idée exacte de l’utilité des machines à triple expansion dans la marine militaire d’une part, d’autre part et surtout dans la marine commerciale.

« Malgré les appréhensions et les difficultés éprouvées au début de l’application des machines à triple expansion, on s’accorde, dit la Revue industrielle, à reconnaître aujourd’hui qu’elles sont absolument pratiques, et qu’il n’est pas plus difficile de travailler à 10 ou 11 kilogrammes qu’à 5 ou 6 kilogrammes de pression, comme dans les machines Compound ordinaires. Les essais comparatifs exécutés en Angleterre, sur des navires de même type marchant les uns en Compound et les autres à triple expansion, prouvent, en effet, qu’on peut réaliser couramment avec ces derniers une économie de charbon d’au moins 20 %, et même dans certains cas de 30 %. Au lieu de brûler 1 kilogramme de charbon par cheval, on ne dépasserait pas 700 grammes, grâce à la détente qui peut être poussée à 14 fois, avec une admission moyenne de cinq sixièmes.

« Ces avantages sont particulièrement précieux pour les paquebots à grande vitesse, qui ont intérêt à effectuer une traversée dans le plus court délai possible, et par conséquent, à faire travailler les machines à pleine puissance.

« Il n’en est pas ainsi pour les grands navires de guerre, où la marche à triple expansion n’est réellement économique qu’en temps de guerre. Lorsque ces bâtiments font des croisières, ils n’utilisent guère plus du sixième de leur puissance maximum, de sorte que les machines travaillent, pendant la plus grande partie de leur existence, dans des conditions économiques défavorables. La marine n’a donné jusqu’ici la commande que d’un seul croiseur, le Tage, où la machine sera à triple expansion. Ce bâtiment est construit à Saint-Nazaire sur les Chantiers de la Loire. Les trois cylindres du moteur sont horizontaux et disposés de manière à permettre de désembrayer le grand cylindre et à marcher en Compound.

« Les contrats passés depuis par la marine avec les constructeurs stipulent l’emploi des machines Compound. L’application de la triple expansion à bord des navires de l’État semble donc écartée à nouveau. Elle se développe très rapidement, au contraire, sur les paquebots à grande vitesse, et on peut affirmer que d’ici à peu d’années, les armateurs seront obligés soit de transformer leurs machines, soit d’en installer de nouvelles à triple détente. »


Voici, d’après M. Hall[1], quels sont les avantages principaux que les machines à triple détente présentent sur le type Compound, pour les applications à la marine :

1o À égalité d’espace, on peut obtenir une puissance plus grande, sans accroître l’encombrement ;

2o L’augmentation de force est souvent obtenue sans augmenter le poids total. M. Hall a constaté, à maintes reprises, que le poids des machines Compound, chaudières comprises, est de 217 kilogrammes par cheval indiqué ; il n’est que de 205 à 210 kilogrammes, avec la triple expansion ;

3o L’usure et la fatigue des organes sont réduites en raison du meilleur équilibre des forces agissant sur la manivelle ;

4o Quant à l’emploi des chaudières à haute pression, leur durée ne semble pas, étant donnés les progrès accomplis dans leur construction et la substitution de l’acier au fer, devoir être moindre que celle des chaudières travaillant à 6 kilogrammes ;

5o Enfin, le service des machines n’ajoute aucune difficulté.

  1. Mémoire de M. Hall à la North-East Coast Institution of Engineers and shipbuilders.