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refouler dans le faux-pont, et de là dans la galerie. L’eau s’échappe par un conduit communiquant avec l’extérieur. L’hydrostat reprend sa légèreté en même temps que la cale se remplit d’eau, et bientôt il flotte comme primitivement. C’est alors qu’on ouvre l’écoutille de l’entre-pont et qu’on ramène, au moyen d’un treuil et de câbles, l’hydrostat au lieu de son débarquement, ou qu’on l’amarre à des bouées près du lieu de travail.

« La cale est carrée. Elle mesure 8 mètres de côté sur 2 mètres de hauteur. Le faux-pont a les mêmes dimensions. L’entre-pont a la même hauteur, mais il n’a que 5 mètres de côté. L’hydrostat a donc 6 mètres de hauteur, et sa base, qui a pour plancher le fond de la mer, a 64 mètres carrés de surface. Nous avons déjà dit qu’une galerie complétement fermée entoure les deux étages inférieurs. Elle est, comme le faux-pont, divisée en plusieurs compartiments plus petits qu’on peut faire communiquer entre eux ou rendre indépendants les uns des autres au moyen de robinets.

« L’hydrostat sous-marin de M. Payerne résout donc à la fois plusieurs difficultés. Une manœuvre intérieure le submerge et le transforme en une cloche à plongeur ; puis elle le ramène à la surface ou le transforme en un radeau qui se déplace à volonté[1]. »

Depuis l’année 1855, M. Payerne a beaucoup perfectionné son appareil sous-marin. Il en a fait un véritable bateau, du moins par la forme ; car, dans le fond, il ne diffère point de la machine précédente, ne pouvant naviguer sous les eaux. M. Payerne avait eu l’idée de le pourvoir d’une hélice et d’une machine à vapeur, pour lui donner le mouvement. Mais aucun artifice n’ayant permis d’arriver à entretenir un courant d’air dans le foyer ainsi submergé, et contenu dans une enveloppe en tôle, il fallut chercher un combustible qui fût oxygéné par lui-même.

M. Payerne essaya, dans ce but, l’azotate de soude ou de potasse. Mais ce sel présentait de réels dangers d’explosion, et l’on y renonça.

M. Payerne n’a donc pu réussir à créer un véritable bateau sous-marin. Il est resté dans l’ancienne donnée de la cloche à plongeur, et cette fois encore, on peut le dire, le bateau sous-marin est tombé dans l’eau.

Quoique réduit à l’état de simple cloche à plongeur, l’appareil du docteur Payerne a pourtant rendu quelques services. Il est propre surtout aux travaux et constructions sous-marines. En 1847, on l’a employé à Brest, pour débarrasser le chenal d’une roche très-dure, qui s’opposait au lancement d’un des plus beaux bâtiments de notre marine, le Valmy. Il a fait le même office à Cherbourg, et c’est grâce à lui qu’on a pu désobstruer le port de Fécamp, encombré par des galets qui empêchaient l’entrée de tous les navires d’un fort tonnage. À Paris, il a servi à enlever la pile d’un pont et à extraire les débris de toutes sortes qui encombraient le lit du fleuve.

Le journal la Science pour tous a décrit en ces termes, l’invention du docteur Payerne, en émettant sur cet essai un espoir que l’avenir n’a pas confirmé.

« Le bateau a une forme ovoïde ; il est en tôle assemblée et solidement rivée ; des lentilles de verre, placées au milieu de la paroi, y laissent pénétrer un jour abondant. Il est divisé en plusieurs chambres ou compartiments, et le plus vaste, celui du milieu, qu’on appelle la chambre du travail, est muni d’un plomb mobile qu’on relève au moment où l’on veut établir le contact entre l’eau ou le fond et l’intérieur du bateau. Celui-ci, avant le départ, est d’abord rempli d’air comprimé à une pression déterminée par la profondeur à laquelle on se propose de descendre ; puis on laisse pénétrer au moyen de robinets, dans les compartiments spéciaux, une quantité d’eau telle que la densité du bateau soit un peu supérieure à celle du volume d’eau qu’il déplace ; il gagne alors le fond, et, d’après cela, on conçoit aisément que, se trouvant, grâce à l’air qu’il contient, posséder une aise, si, au bout de quelques heures, l’air se trouvait vicié, il suffirait de le mettre en contact avec des substances capables d’absorber l’acide carbonique, ce qui, d’ailleurs, a lieu avec la plus grande facilité, en faisant passer l’air d’un compartiment dans un autre, et lui faisant alors traverser une solution de potasse[2]. »

La figure 425 donne, d’après le journal qui vient de nous fournir cette description, le plan du bateau sous-marin du docteur Payerne.

  1. Le Fond de la mer, in-12. Paris, 1868, page 228.
  2. Année 1857.