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ses héritiers. Soixante ans plus tard (en 1827), la Trinity-House s’étant fait céder la propriété de ce phare, versa au propriétaire une indemnité de 4 250 000 francs.

Construit sur le même principe que les tours d’Eddystone et de Skerryvore, le nouveau phare de granit qui a été bâti en 1861, sur les roches de Smalls, laisse bien loin la baraque érigée en 1776 par les mineurs de Cornouailles, mais elle ne l’a pas fait oublier.

Nous ne terminerons pas cette revue sommaire des phares anglais, sans parler d’une opération extrêmement curieuse qui fut accomplie en 1841, sur le phare de Sunderland.

Sunderland est une ville du nord de l’Angleterre. Le commerce et la population de ce port s’étant notablement accrus depuis le commencement du siècle, on dut, en 1841, y établir une longue jetée, pour remplacer un ancien quai devenu insuffisant. Ce quai supportait un phare construit depuis vingt ans. On pensa d’abord qu’il faudrait nécessairement démolir le phare, en même temps que le quai, et réédifier le monument au bout de la jetée, à une distance de 160 mètres environ de sa première place. Cependant une proposition inattendue vint à surgir. Un ingénieur, John Murray, proposa de transporter le phare, sans le démolir, au nouvel emplacement qu’on lui destinait, avec le seul secours des engins mécaniques. Cette offre fut acceptée.

L’entreprise était hardie ; car la tour avait 5 mètres seulement de diamètre à la base, et 25 mètres de hauteur ; elle pesait 757 000 livres. En outre, la jetée était plus élevée d’un pied sept pouces que l’ancien quai, et se trouvait dans une direction tout autre. Il fallait donc que l’édifice parcourût une ligne brisée ; il fallait en outre le faire pivoter sur lui-même, et le remonter le long d’une pente.

On procéda de la manière suivante, pour arriver à ce résultat extraordinaire. Des ouvertures furent pratiquées dans les murs, à la base de la tour, et l’on y enfonça des poutres, que l’on relia par des traverses, de manière à former une espèce de plate-forme située à une petite distance du sol. Après avoir fixé sous les poutres 144 roues en fonte, creusées d’une gorge, on détruisit la partie inférieure des murs, et l’édifice se trouva assis sur la plateforme, portée elle-même sur les galets en fonte. De nombreux étais soutenaient la tour dans toute sa hauteur.

Les choses étant ainsi disposées, le colosse fut tiré sur des rails, au moyen de chaînes de fer, que des hommes enroulaient sur des treuils. Afin de réduire la dépense à son minimum, on enlevait les rails à mesure que le monument avançait, et on les portait plus loin. Le trajet dura treize heures, et l’opération s’accomplit sans accident. Elle fut très-économique ; car elle ne coûta que 27 000 francs, tandis que la construction d’un nouveau phare aurait entraîné une dépense de 50 000 francs.


CHAPITRE XI

phares situés hors d’europe. — phare du maroc. — phares de pondichéry, de la guyane, de la nouvelle-calédonie, du japon, etc.

Nous parlerons maintenant de quelques phares situés hors de l’Europe, dans des régions diverses et plus ou moins éloignées.

Sur la côte du Maroc, à l’entrée du détroit de Gibraltar, existe un cap où sont venus se briser de nombreux navires : c’est le cap Spartel. Cette côte dangereuse constituait une source de revenus assez importante pour les Marocains, qui s’appropriaient les épaves rejetées par la mer, et qui, d’ailleurs, n’ayant point de marine, ne redoutaient point pour eux-mêmes les écueils du rivage africain. On ne pouvait donc compter sur les indigènes pour élever un phare dans ces parages.

En 1852, M. Jagerschmidt, gérant de notre consulat à Tanger, proposa d’élever