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Cette dernière expression, traduite en français, aurait produit la dénomination dont on recherche l’origine.

Montfaucon, d’après les études qu’il put faire sur les lieux, a donné le dessin que nous reproduisons plus haut (fig. 269, page 421), comme représentant les situations respectives du phare, du port et de la ville de Boulogne.

Il suffit de réfléchir un instant pour se convaincre que, vis-à-vis de la tour de Boulogne, il a dû exister autrefois, sur la côte de la Grande-Bretagne, un second phare, destiné à éclairer les vaisseaux qui, venant des Gaules, voulaient entrer dans les fleuves de la Grande-Bretagne, ou débarquer sur cette côte. Le phare de Boulogne ayant été fondé par les Romains, il est à croire que le phare opposé avait été construit par le même peuple, qui avait, d’ailleurs, le plus grand intérêt à l’établir.

Voilà ce que se dit Montfaucon, au siècle dernier, et pour vérifier ses conjectures, le savant bénédictin alla recueillir en Angleterre des renseignements qui confirmèrent son opinion.

Montfaucon trouva sur la côte de Douvres, un édifice effondré, qui lui parut être ce qu’il cherchait. Il faut avouer, toutefois, que la description qu’il donne de ces ruines, n’inspire pas grande confiance. Un vaste amoncellement de pierres, que l’on appelait, en anglais, la goutte de malice du diable, et d’après lequel on dressa, aussi exactement que possible, le plan de l’édifice primitif, voilà l’unique source où le savant antiquaire puisa les détails qu’il nous a transmis sur le phare de Douvres.

D’après la description que donne Montfaucon, la tour de Douvres était à huit pans, comme celle de Boulogne. Elle allait en diminuant de la base au sommet, mais n’offrait point d’étages en retrait les uns sur les autres. Elle avait d’après cela, la forme d’une pyramide tronquée. Le vide intérieur était quadrangulaire, et d’égal diamètre à toutes les hauteurs. La diminution du périmètre intérieur portait donc exclusivement sur les murs, lesquels avaient une épaisseur considérable en bas, mais beaucoup moindre au sommet. Des ouvertures étaient percées, de distance en distance, sur une même ligne verticale.

Ce qui jette une grande obscurité sur l’histoire de cet édifice, c’est qu’on n’a pas la certitude qu’il soit identique avec l’ancien phare romain. Du temps de Montfaucon, bien des gens estimaient que la tour qui avait dû servir de phare à Douvres, à l’époque romaine et du temps de leurs successeurs, était tout simplement une tour carrée, bâtie au milieu du château de Douvres, et qui mesurait 72 pieds de haut. De cette élévation, en effet, on apercevait les côtes de France, et l’on dominait la mer sur une grande étendue.

Ce qui porte à croire que cette tour était un phare, c’est qu’elle était percée de fenêtres rondes sur les trois faces qui regardaient la mer, tandis que le côté tourné vers la terre était dépourvu de fenêtres.

Montfaucon se fonde sur la forme carrée de cette dernière tour pour prétendre qu’elle n’est pas d’origine romaine. Selon lui, elle n’aurait été utilisée, comme phare, qu’après que la tour octogonale fut tombée en ruines, ou bien lorsqu’on eut jugé sa position meilleure pour le but qu’on voulait atteindre.

On voit, en résumé, qu’il reste des doutes sérieux sur la véritable tour romaine de la côte de Douvres. La question ne peut être tranchée avec confiance ni dans un sens ni dans l’autre.

La figure 270 représente, d’après Montfaucon, la tour octogonale de Douvres, que le savant bénédictin considérait comme le phare romain, et au premier plan la tour carrée enclavée dans les fortifications. Comme nous l’avons dit, cette dernière tour, d’après d’autres écrivains, serait le véritable phare de l’antiquité. Le lecteur choisira entre ces deux versions.

Ajoutons qu’au moyen âge, la tour carrée