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nous donner à cet égard des renseignements instructifs[1].

« Les Anglais, disent MM. Blondel et Serr, sont les premiers à convenir que la pureté de l’air de leurs salles tient bien plus à la ventilation qu’ils y produisent par l’ouverture courante des croisées et des portes, qu’aux dimensions de ces salles, au petit nombre de lits, à la propreté et à la simplicité du matériel.

« Nous déclarons volontiers que nous n’avons point reconnu dans les hôpitaux de Londres, l’odeur particulière aux salles de malades, si fréquente dans nos établissements.

« Vous ne sauriez, monsieur le Directeur, pour vous figurer ce que nous avons vu, donner trop d’extension à cette expression d’ouvrir les fenêtres : vous resterez toujours au-dessous de ce qu’elle signifie en Angleterre. Ce n’est pas çà et là, comme chez nous, une partie de croisée qui laisse entrer l’air du dehors ; ce sont toutes les croisées, toutes les portes des salles qui restent ouvertes constamment ; et, de peur que cela ne suffise pas, on ménage des communications directes ou indirectes avec l’extérieur, à travers les murs, dans les impostes des portes, au-dessus des croisées, quand celles-ci ne montent pas jusqu’au plancher haut ; on en voit ainsi dans les plafonds, dans les coffres des cheminées……

« Certaines parties de croisées ont des carreaux percés, ou remplacés par des treillis de fer. Ailleurs on établit, au lieu de vitres, des ouvertures à soufflet qui restent béantes en toute saison, la nuit comme le jour.

« Le programme de nos voisins, en fait de ventilation, est donc des plus simples : De l’air pur, quelle que soit la température, quels que soient les courants……

« Quoi qu’il doive en advenir par la suite, on peut dire, dès à présent, que les Anglais balayent leurs salles par des bourrasques de vent ; tandis que les Français tiennent à purifier les leurs sans secousses et sans courants sensibles. »

Nous avons cité ces dernières phrases in extenso, autant parce qu’elles expriment nettement l’état des choses, que pour montrer que les deux auteurs du Rapport sur les hôpitaux de Londres, malgré la fidélité de leur exposé, sont encore plutôt partisans du vicieux système de Paris, que de l’excellent usage de l’Angleterre.

L’hôpital de Glascow, qui a été longtemps cité comme un modèle, peut servir à faire comprendre la manière dont les salles d’hôpitaux sont ventilées dans la Grande-Bretagne. Chaque salle, qui contient 19 lits, est pourvue, en son milieu, d’une double et énorme cheminée, à laquelle aboutit un large tuyau de ventilation. L’air attiré de l’extérieur, par l’appel de la cheminée, suit le tuyau de ventilation et se déverse dans chaque salle. Le conduit ventilateur puise l’air à l’ouverture des fenêtres, l’amène à travers le mur et le plancher, et le verse en haut et en bas de chaque salle. Une bouche aspirante est ouverte en haut de chaque plafond, pour attirer au dehors l’air vicié.

Cependant la ventilation se fait surtout par l’ouverture fréquente des fenêtres, qui sont hautes de près de 3 mètres, et dont la largeur occupe les deux tiers de la façade de l’édifice. Tout est là. On comprend quelles prises a le vent, pendant la journée, sur des salles dont chacune est munie d’une double cheminée d’appel, et comment la nuit, une ventilation, considérable encore, s’effectue par le tirage de la même cheminée d’appel, demeurée chaude.

L’exposition au grand air est donc la grande loi du système anglais, et ainsi s’explique la faible mortalité reconnue, d’une manière irréfragable, aux hôpitaux de la Grande-Bretagne.

Nous ajouterons, à l’appui de la même idée, que, dans divers établissements hospitaliers de la Prusse, on établit les lits des opérés dans de petits pavillons, au milieu des jardins. Grâce à cette précaution, la mortalité des opérés est, dit-on, très-minime. Mon ami, le professeur Courty, de Montpellier, qui m’a rapporté ce fait, ajoutait qu’il ne pouvait revenir de sa surprise de voir les malades que l’on aurait entourés dans nos hôpitaux, de clôtures de tout genre, être ainsi largement exposés à l’influence de l’air.

Cette disposition nouvelle est, d’ailleurs,

  1. Rapport sur les hôpitaux civils de la ville de Londres. Ce volume est écrit sous forme de lettres à M. le directeur de l’Assistance publique de Paris.