Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 4.djvu/393

Cette page a été validée par deux contributeurs.

eu l’idée lumineuse de supprimer les orifices d’entrée ménagés à l’air au-devant des loges et galeries, c’est-à-dire les seuls qui, dans l’application, n’eussent pas présenté de trop sérieux inconvénients. Il les avait remplacés par un agrandissement notable de l’orifice concentrique à la rampe et placé entre cette dernière et l’orchestre ; par un autre orifice ou grille également concentrique à la rampe, mais situé du côté des acteurs ; enfin, par des bouches ménagées dans le cadre du rideau. Plus tard, il est vrai, grâce à un ordre supérieur, les bouches situées au-devant des loges et galeries furent rétablies, mais seulement au premier et au deuxième étage. Tout incomplète et tardive que fût cette mesure, il n’en est pas moins fort heureux qu’elle ait été prise, car ces bouches sont actuellement le seul moyen qui subsiste de faire affluer l’air nouveau. Bientôt, en effet, on dut supprimer les deux ouvertures concentriques à la rampe, parce qu’elles gênaient les acteurs et étaient intolérables pour les musiciens de l’orchestre. Puis le directeur ayant, de son autorité privée, supprimé celles ménagées dans le cadre du rideau, il ne resta plus pour alimenter la salle que les bouches des premières et secondes loges et d’autres ouvertures, fort gênantes pour le public, pratiquées au fond du parterre, dans la paroi verticale du mur. En réalité, le renouvellement de l’air s’effectue presque uniquement par la scène. M. Morin a constaté en effet, pendant la première représentation d’une pièce militaire à grand spectacle, qu’il s’établit de ce point vers la salle un courant d’air froid dirigé, non comme autrefois vers la voûte, mais vers le fond des loges, où sont situées les bouches de sortie, — courant tellement vif qu’il agite d’une façon sensible les plumes des chapeaux des dames. Il a constaté en outre que ce même courant entraîne avec lui la fumée de la poudre, pour laquelle on n’a pas établi de cheminée d’évacuation au-dessus de la scène, et qui se répand dans les loges où elle provoque de nombreux accès de toux. Ainsi, non-seulement le théâtre du Châtelet n’est pas ventilé d’une façon régulière, mais le renouvellement de l’air s’y effectue dans des conditions moins favorables que dans les anciens théâtres.

De pareils résultats n’expliquent que trop bien les récriminations soulevées par le travail de la commission, et tout en reconnaissant qu’elle ne doit être responsable, ni des fautes des architectes, ni des pratiques coupables des directeurs, on ne peut se dissimuler qu’une grande partie des inconvénients relevés par la critique sont inhérents au système adopté. »

Le nouveau théâtre du Vaudeville, inauguré en 1869, a été également doté de la ventilation par appel, selon les us et coutumes des architectes de la ville de Paris, à laquelle cette salle appartient. Si nous ajoutons, dès lors, que l’orchestre, le parterre et les loges du théâtre du Vaudeville, sont balayés, de minute en minute, par de véritables vents de tempête, par des ouragans, nous n’étonnerons pas nos lecteurs. Le lieu de réunion publique dans la capitale où se prennent aujourd’hui de préférence les fluxions de poitrine, les rhumatismes, ou tout au moins les rhumes et les coryzas, est le nouveau Vaudeville de la chaussée d’Antin.

S’il nous fallait faire un projet de ventilation pour un théâtre quelconque, nous nous servirions encore des mêmes moyens que nous avons proposés pour la ventilation des salles de réunion, c’est-à-dire d’un ventilateur mécanique envoyant de l’air pur au moyen d’un excès de pression. L’air arriverait dans la salle par la partie inférieure, c’est-à-dire sous les pieds des spectateurs de l’orchestre et du parterre. Nous proposerions aussi d’en revenir au système ancien d’éclairage, consistant en un lustre ordinaire, surmonté d’une large ouverture au plafond, par lequel s’évacuerait naturellement l’air vicié. Le renouvellement de l’air s’opérerait donc par deux actions différentes, par l’effet de l’impulsion de l’air envoyé par le ventilateur mécanique, et par l’appel puissant que déterminerait la chaleur du lustre.

On le voit, nous nous bornerions, pour progresser dans la question de la ventilation des théâtres, à revenir en arrière, c’est-à-dire à reprendre les idées de d’Arcet. Ce système fut vivement critiqué en 1862, dans une brochure qui portait ce titre : Le Théâtre et l’architecte, par M. Émile Trélat. Le travail de M. Émile Trélat porta coup. C’est grâce à l’impression qu’il fit sur beaucoup d’esprits, que l’on fut mené à voir de mauvais œil l’antique lustre. Cet appareil d’éclairage a été finalement détrôné et les plafonds lumineux l’ont remplacé dans les nouveaux théâtres de la capitale. Or, de l’adoption des plafonds lu-