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mant autant de chefs de station, sont envoyés sur les points convenus pour diriger les fécondations et en tenir attachement. Ils sont porteurs d’instructions particulières de l’ingénieur ordinaire, ainsi que d’un carnet imprimé, précédé des instructions générales approuvées. Ce carnet, divisé en feuillets et composé par analogie avec celui tenu sur tous les ateliers des ponts et chaussées, énumère, pour chaque fécondation, les circonstances remarquables, reçoit l’inscription des lieux de provenance, des quantités d’œufs obtenues, de l’état des poissons adultes ayant donné les œufs et la laitance, des jours et heures de production, d’emballage et de départ pour l’établissement. Ces chefs de station envoient des feuilles hebdomadaires, résumant les opérations et les frais.

« Les lieux de production sont fréquemment visités par l’explorateur durant la période des fécondations, et M. l’ingénieur ordinaire est autorisé à faire des voyages pour les vérifications jugées nécessaires.

« À son arrivée à l’établissement, chaque boîte est contrôlée pour la quantité et la qualité. Le comptage est fait au moyen de petites mesures de capacité, étalonnées selon les espèces et les grosseurs des œufs. Les œufs détériorés sont comptés à part. Un registre d’arrivée reçoit les inscriptions dans deux parties distinctes, la première par ordre chronologique, la seconde divisée en autant de comptes ouverts qu’il y a de fécondations et d’arrivages séparés. Les œufs sont aussitôt répandus dans les appareils pour toutes les espèces des deux campagnes, sauf les œufs de Féra, réexpédiés immédiatement pour être ensemencés sans incubation. Les comptes ouverts relatent les appareils par leur numéro d’ordre et sont tenus constamment à jour pour y noter quotidiennement les triages des œufs morts, les progrès de l’incubation, l’époque de l’embryonnement, et saisir le moment opportun pour l’emballage et l’expédition.

« Si l’on songe qu’au plus fort des opérations il y a des millions d’œufs présents de plusieurs espèces, répandus sur des milliers de claies, réclamant une surveillance incessante, des écritures très-minutieuses ; si l’on réfléchit aux soins à donner à la distribution des eaux, aux précautions à prendre contre la trop vive lumière et les variations de température, aux emballages et expéditions très-différents d’un jour à l’autre, en espèces, quantités et directions, l’on se formera une idée du travail assidu imposé au régisseur, à son adjoint et à un petit nombre d’ouvriers auxiliaires.

« Quand les œufs commencent à arriver et qu’on peut se rendre approximativement compte de la récolte probable, M. l’ingénieur en chef, au bureau duquel est tenu un registre chronologique d’inscription des demandes présentées pour obtenir des œufs fécondés de l’établissement de Huningue, dresse, par ordre d’importance, basé sur les succès antérieurs, sur les conditions favorables d’installation et sur le but déclaré des opérations, des listes successives de propositions concernant la distribution des œufs. Ces listes sont soumises à la sanction ministérielle pour être servies dans la proportion des approvisionnements.

« L’Administration n’a recours à aucun des moyens usités pour accroître la clientèle des industriels. Elle ne fait pas d’annonces, et elle ne contracte pas d’engagement préalable, se réservant d’examiner les titres des demandeurs classés par M. l’ingénieur en chef. Les quantités sollicitées ont été toujours en augmentant, et toujours elles ont dépassé considérablement les quantités disponibles, malgré l’accroissement continuel des récoltes. Aussi, pour mieux apprécier les garanties offertes du bon emploi des produits généreusement accordés, l’Administration exige-t-elle que les destinataires rendent un compte détaillé de leurs opérations, avant de participer à des distributions subséquentes.

« Les précautions convenables sont prises au départ des boîtes renfermant les œufs, pour les garantir contre les intempéries et pour les faire parvenir par les voies les plus rapides. Les accidents de route, les retards provenant des bureaux de correspondance des chemins de fer, les abus résultant de l’exagération des prix de port, sont évités dans la suite lorsqu’ils sont signalés. Il appartient d’ailleurs aux destinataires d’exercer eux-mêmes les poursuites d’usage en pareil cas ; mais de nouvelles dispositions seront prochainement appliquées, pour rendre le contrôle de l’établissement aussi efficace que possible à cet égard.

« Les destinataires sont au reste avertis du départ des œufs, généralement un jour à l’avance, par une lettre d’avis dont un feuillet doit être détaché et renvoyé à M. l’ingénieur en chef, avec des annotations relatives au mode et à la durée du transport, à la température de l’air lors de la réception, à l’emballage, au nombre d’œufs arrivés, soit sains, soit altérés. Ils sont guidés par des instructions imprimées, composées par M. Coste, sur les soins à donner aux œufs fécondés et aux jeunes poissons nouvellement éclos, et des formules leur sont transmises pour y enregistrer les observations faites pendant le complément d’incubation et l’éclosion, jusqu’au moment où les jeunes poissons, débarrassés de la vésicule ombilicale, peuvent être lancés dans les eaux courantes ou placés dans les locaux préparés pour l’élevage. À cette époque les destinataires envoient le relevé de leurs opérations, en consignant à la fin l’emploi des alevins. L’année suivante, ils sont invités à répondre à des questions sur les résultats de leur élevage dans les espaces clos et sur la présence et l’acclimatation des poissons lâchés dans les cours d’eau.

« Les opérations s’enchaînent, comme on voit, avec la régularité nécessaire pour obtenir le meil-