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l’ancien fusil rayé que les hommes connaissaient bien et qu’ils avaient appris à pratiquer de longue main.

« Quant aux résultats obtenus par les régiments de la Garde, et surtout par le bataillon de chasseurs à pied, celui de tous les corps qui, par la priorité de l’armement, a eu le plus de temps à employer à ces exercices, ils témoignent par leurs progrès rapides de la facilité avec laquelle les hommes se familiarisent avec leur arme tout autant que de sa grande précision.

« Le tableau ci-après, indiquant le nombre moyen des balles, sur 100, mises dans la cible aux différentes distances, d’abord avec l’ancien fusil, puis avec le nouveau, pour chacune des catégories de troupe correspondant aux époques successives de l’armement, présente, sous ce rapport, des comparaisons du plus haut intérêt, dont je demande à Votre Majesté la permission de placer le détail sous ses yeux :

moyennes obtenues : moyennes de tir
aux distances de
200m 400m 600m 800m 1 000m
Avec l’ancien fusil rayé :          
Infanterie de ligne 
30,8 15,8 8,3 » »
         
Avec le fusil modèle de 1866 :          
Infanterie de ligne. 
35,6 26,2 19,7 14,3 8,2
(Instruction commencée depuis peu.)          
Infanterie de la Garde 
59,4 37,3 26,0 21,0 16,0
(Instruction plus avancée.)          
Chasseurs à pied de la Garde 
69,8 46,6 36,1 28,4 27,7
(Instruction complète.)          

« Dès aujourd’hui, si l’on prend la moyenne générale obtenue avec le fusil modèle 1866, il est facile d’apprécier combien cette arme remporte en précision sur l’ancien fusil rayé, aux distances ordinaires de 200, de 400 et de 600 mètres.

« Aux grandes distances, à 1 000 mètres, les résultats utiles dépassent la moyenne de l’effet produit par ce dernier à 400 mètres, et atteignent au double de ceux obtenus auparavant à 600 mètres, limite extrême de la portée efficace du tir d’alors.

« Ces résultats eux-même ne sont pas encore l’expression définitive de la valeur du tir nouveau.

« Lorsque les corps armés depuis peu auront eu le temps de compléter leurs exercices, il est hors de doute que la moyenne de tir des corps d’infanterie de la ligne s’élèvera promptement, comme pour ceux de la Garde, dans de fortes proportions.

« Plusieurs inconvénients provenant de diverses causes, inhérentes pour la plupart à des défauts de détail dans la fabrication, et auxquels il a été promptement apporté remède, se sont manifestés pendant les essais et au commencement de la mise en service dans les corps.

« Ces inconvénients, très-exagérés à leur origine, et dans tous les cas, rendus plus sensibles par le manque d’habitude chez nos soldats, dans le maniement d’une arme toute nouvelle pour eux, consistent en des bris d’aiguilles et de têtes mobiles, des crachements, des fentes au bois, des ratés de cartouches à balles et surtout à blanc.

« Aucun de ces accidents ne présente aujourd’hui de caractère sérieux de gravité.

« En se familiarisant avec leur fusil, les hommes apprennent facilement, et en très-peu de temps, à éviter d’eux-mêmes des inconvénients qui ne se reproduisent plus guère que dans les corps nouvellement armés.

« Les bris d’aiguilles et de têtes mobiles, assez nombreux pendant la période d’essai, provenaient d’une trempe défectueuse et d’un recuit insuffisant. Il y a été remédié en modifiant la fabrication en conséquence, et la moyenne des aiguilles remplacées dans les corps est maintenant très-faible ; elle est inférieure à celle des bris de cheminées dans les anciens fusils à percussion, et encore bon nombre de ces accidents doivent-ils être attribués bien plus à la maladresse de quelques hommes qu’à une défectuosité dans le mécanisme de l’arme.

« Le remplacement d’une aiguille brisée au feu est, du reste, une opération extrêmement simple, à laquelle les soldats sont exercés et qu’ils effectuent, sur place, avec la plus grande rapidité.

« Les crachements, ayant pour cause un défaut de fabrication de l’arme, sont extrêmement rares ; on y remédie en changeant la boîte de culasse ou le cylindre de la culasse mobile.

« Le même accident peut être occasionné par des rondelles défectueuses ; rien n’est plus simple que de changer ces rondelles.

« Enfin, sous l’influence de l’abaissement de la température, des fuites de gaz ont été quelquefois observées, mais seulement par des froids assez considérables qui ôtent à l’obturateur son efficacité. L’expérience a démontré que, dans ce cas, les crachements disparaissent presque toujours après le premier coup tiré, l’obturateur reprenant sa forme normale sous l’action de la chaleur développée par l’inflammation de la charge.

« Ces crachements, d’ailleurs, susceptibles peut-être de gêner le tireur, ne paraissent pas de nature à le blesser.

« Quelques bois se sont fendus par suite d’une mise en bois défectueuse ; ce défaut est évité actuellement en manufacture. Au moyen d’une légère réparation,