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la grosse tour du château de Ham, laquelle existe encore.

Dans l’attaque des places, les soldats et les pionniers allaient jusqu’au pied des murailles pour les saper, et la principale défense de l’assiégé était dans les mâchicoulis, d’où, à couvert et directement, il faisait pleuvoir sur les travailleurs, des pierres et des matières enflammées. Or, les boulets de fonte s’en prirent tout d’abord aux mâchicoulis, et les broyèrent. Bientôt, soit que l’épaisseur des murailles fût devenue trop grande, soit qu’il fût trop dangereux de s’avancer à découvert sous les coups de la nouvelle artillerie, la défense verticale du pied de la muraille, devint impossible »

Alors, et avant qu’un autre mode de protection fût trouvé, l’attaque acquit une notable supériorité sur la défense. Pendant un demi-siècle environ, on vit Louis XI renverser les donjons de la féodalité française ; Charles VIII, Louis XII, dans leurs expéditions en Italie, s’emparer des places fortes avec une facilité qui frappait leurs ennemis d’étonnement et d’effroi.

Pour défendre le rempart des effets destructeurs de l’artillerie, on épaula ce rempart avec des soutènements de terre, élevés du côté de la ville. On espérait ainsi faire un tout de meilleure résistance. Mais, disait Philippe de Clèves, « quand on bat la muraille, j’ai veu toujours tomber le rempart avecques, et y faisoit beaucoup meilleur monter. »

Fig. 244. — Les premiers remparts de terre.

Outre l’inconvénient signalé par Philippe de Clèves, le rempart de terre exerçait sur la muraille une pesée, qu’on ne savait pas alors calculer, et qui en diminuait la solidité.

La figure 244, tirée de l’atlas du Trattato di architettura civile e militare di Francesco di Giorgio Martini, montre un autre emploi du rempart de terre intérieur, bien meilleur que le précédent, et même irréprochable au point de vue de la fortification telle qu’elle est comprise aujourd’hui.

Les pierres amoncelées au premier plan, sont les débris de la muraille battue en brèche. Derrière en arc de cercle se raccordant avec les portions de la muraille restées debout, se voit le rempart de terre, soutenu par des poutres et des cloisonnages. Les deux massifs qui le terminent, cachent derrière leurs angles, deux canons, dont les feux se croisent. Des arquebusiers et d’autres soldats peuvent être logés sur toute la circonférence de ce rempart. L’assiégeant, pour monter à l’assaut, doit arriver dans la formidable concavité de cet arc de cercle, traverser cette gorge, où tous les feux convergent, et gravir le rempart. On conçoit toute la puissance d’une pareille fortification ; le canon même a peu de prise sur elle, parce qu’elle est garantie par les débris de la muraille écroulée, et parce que les boulets s’enfouissent dans son épaisseur, sans laisser le plus souvent trace de leur passage.