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pas été soumise à une expérience sérieuse.

Le général Lenk a essayé d’arriver au même résultat, c’est-à-dire d’obvier aux propriétés brisantes du fulmi-coton, en diminuant la rapidité de son inflammation. À cet effet, il a comprimé du coton-poudre dans de petites cartouches, qui s’enflammaient beaucoup moins vite que le fulmi-coton modérément comprimé. Il a fait ensuite des cartouches allongées en papier, entourées de fulmi-coton tressé. Des pièces de canon tirées avec de semblables cartouches contenant 48 grammes de pyroxyle, n’ont pas été détériorées.

Il résulte enfin d’observations récentes, qu’en refroidissant à 5 ou 6 degrés au-dessous de zéro, le mélange des acides, dans lequel on plonge le fulmi-coton pour le préparer, on retarde, on modère l’intensité de la réaction chimique, et l’on obtient un produit dénué de propriétés brisantes.

Que les hommes du métier, que les savants continuent donc l’étude de ce problème, et sans doute quelque solution heureuse viendra couronner et récompenser leurs efforts. Il ne faut pas l’oublier, en effet, la découverte du coton-poudre ne date que de 1846. Qu’est-ce qu’un tel intervalle pour le perfectionnement des inventions humaines ? N’a-t-il pas fallu quatre siècles pour faire de la poudre actuelle l’agent puissant et sûr que nous connaissons ? D’ailleurs, de nos jours, après tant de travaux, d’expériences, d’innombrables essais, malgré les précautions inouïes dont on s’environne, peut-on dire avec certitude que notre poudre à canon présente dans ses effets une sécurité absolue ? L’existence d’une poudrière aux abords de nos villes, n’est-elle pas, pour les populations, la cause d’invincibles terreurs, la source de perpétuelles alarmes ? Des événements formidables ne viennent-ils pas, par intervalles, justifier et redoubler ces craintes ? Quand la poudre manque de densité ou que son grain est trop fin, elle fait éclater les armes, et le même effet se produit si l’on outre-passe par mégarde les limites de la charge. En 1826, quand l’artillerie voulut substituer aux poudres triturées dans les mortiers, les poudres plus énergiques, préparées avec les meules, on faisait éclater les bouches à feu. Cette sécurité tant vantée de notre poudre à canon, a donc aussi ses limites ; et dans tous les cas, elle est de date fort récente. Il a fallu quatre siècles pour dompter la poudre à canon, et l’on s’étonne que l’on ne soit pas encore arrivé à maîtriser le coton-poudre, qui jouit d’une puissance triple ! Pour décider en dernier ressort ces questions capitales, invoquons des notions moins exclusives ; défions-nous des entraînements d’un enthousiasme irréfléchi, mais aussi tenons-nous en garde contre des préventions fondées sur la tyrannique puissance de la routine et des habitudes. Recherchons avec sincérité le secours et l’infaillible témoignage de la science, et sachons accepter sans arrière-pensée systématique, ce qui se présente à nous avec les dehors incontestables du progrès.

Un dernier trait pour terminer l’histoire du fulmi-coton.

Dans les premiers temps de sa découverte, la poudre-coton avait provoqué dans le public un extrême engouement ; à cette époque, elle était bonne à tout. Rappelons, en quelques mots, les diverses applications de ce nouvel agent, qui furent faites alors avec plus ou moins de succès.

Quelques mécaniciens voulurent tirer parti de la prompte transformation du coton-poudre en fluide gazeux, pour soulever le piston des machines : les gaz produits par la combustion, auraient remplacé la vapeur, comme agent mécanique. Mais il n’était pas difficile de prévoir que la production du gaz, pendant l’inflammation du pyroxyle, est trop brusque pour être utilisée commodément et avec sécurité : l’explosion des machines mit fin aux expériences.

Les matières alimentaires renferment une