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la même, si l’on agissait avec une dissolution de carbonate de potasse, car l’acide carbonique se dégagerait purement et simplement, pendant toute la durée de l’opération.

Le chlorate de potasse étant beaucoup moins soluble dans l’eau froide que le chlorure de potassium, se dépose, en paillettes cristallines nacrées ; tandis que le chlorure de potassium demeure dissous dans l’eau. Il faut que le tube qui amène le chlore dans la liqueur soit un peu large, pour qu’il ne soit pas obstrué par les cristaux de chlorate de potasse qui se déposent. Il suffit de recueillir ces cristaux, de les dissoudre dans l’eau bouillante, et de laisser refroidir la liqueur, pour obtenir du chlorate de potasse, d’une pureté chimique absolue.

On peut obtenir le chlorate de potasse en grand, d’une manière plus économique. On fait arriver du chlore dans de la chaux délayée dans l’eau, ce qui donne une dissolution d’hypochlorite de chaux, et un excès de chaux en suspension. À ce mélange on ajoute du chlorure de potassium, en proportions convenables, et l’on porte le tout à l’ébullition. Il se forme du chlorate de chaux, par la transformation de l’hypochlorite de chaux en chlorate. Une double décomposition s’établit alors entre les deux sels solubles, savoir le chlorate de chaux et le chlorure de potassium ; il se fait du chlorure de calcium et du chlorate de potasse. Tant que dure l’ébullition, le chlorate de potasse reste dissous. Mais si l’on filtre la liqueur bouillante et qu’on la laisse refroidir, le chlorate de potasse se dépose en belles aiguilles cristallines.

Le chlorate de potasse est une source abondante et économique d’oxygène. Il suffit de le chauffer à 450 degrés environ, pour qu’il abandonne tout son oxygène, et c’est même là un des procédés usités dans les laboratoires de chimie pour préparer le gaz oxygène.

Cette facile décomposition du chlorate de potasse fait comprendre que ce sel soit un des agents d’oxydation les plus énergiques que possède la chimie. Quand on a mêlé ce sel à une substance combustible, comme le soufre, le charbon, ou une matière organique, il suffit d’un simple choc, ou d’un frottement un peu rude, pour déterminer l’inflammation de ce mélange. L’oxygène faiblement retenu par le chlore, passe facilement aux corps combustibles, et donne ainsi des mélanges explosifs. Le chlorate de potasse mélangé avec du soufre, avec du charbon ou du phosphore, constitue un mélange tellement combustible que le choc du marteau suffit pour le faire détoner. Quand on triture rapidement dans un mortier de bronze du chlorate de potasse, du soufre et du charbon, il se produit des détonations successives qui imitent des coups de fouet, et l’on voit s’élancer hors du vase des flammes rouges ou purpurines.

L’expérience suivante donne la meilleure idée des propriétés oxydantes du chlorate de potasse. On fait un mélange de chlorate de potasse, de soufre et de lycopode, substance végétale, excessivement divisée et excessivement inflammable. Quelques gouttes d’acide sulfurique versées sur ce mélange, suffisent pour l’enflammer et faire brûler toute la masse avec éclat. Voici la curieuse réaction chimique qui se passe alors. L’acide sulfurique met en liberté l’acide chlorique du chlorate de potasse ; l’acide chlorique rendu libre, se décompose spontanément en chlore et oxygène ; l’oxygène brûle le soufre, l’inflammation se communique à la substance végétale, et la masse entière prend feu.

C’est un mélange tout à fait analogue qui composait les anciens briquets hydro-chimiques, qui furent en usage dans les premières années de notre siècle, et qui ont été détrônés par les allumettes phosphorées. On préparait un mélange de 3 parties de chlorate de potasse, de 1 partie de soufre, dont on faisait une pâte avec de l’eau gommée, et l’on appliquait cette pâte à l’extrémité de chaque allu-