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tude expérimentale de la pile, eurent pour résultat d’ébranler, ou du moins de mettre en question la doctrine de Volta, c’est-à-dire le principe du développement de l’électricité par le contact. Le 26 octobre 1800, Humphry Davy exposait ainsi le résultat de ses premiers essais :

« J’ai trouvé, par de nombreuses expériences, que le galvanisme est un procédé purement chimique, et dépend entièrement de l’oxydation de surfaces métalliques qui ont des degrés différents de conductibilité électrique. Le zinc ne décompose pas l’eau pure, et si les plaques de zinc sont humectées avec de l’eau pure, la pile n’agit pas. Mais le zinc peut s’oxyder, étant en contact avec de l’eau qui tient en solution de l’oxygène de l’air atmosphérique ou des acides ; la pile agit alors, et son intensité est en proportion de la vitesse avec laquelle le zinc s’oxyde.

« La pile n’agit que pendant quelques minutes, quand on l’introduit dans du gaz hydrogène, dans de l’azote ou dans de l’hydrogène carboné ; elle n’agit alors que le temps tout juste pendant lequel l’eau qui sépare ses couples tient de l’oxygène en dissolution… Elle agit très-vivement dans le gaz oxygène. Quand les couples sont humectés d’acide chlorhydrique, l’action de la pile est très-puissante ; mais elle l’est infiniment plus quand on emploie l’acide nitrique. Cinq couples avec de l’acide nitrique donnent des étincelles égales à celles de la pile ordinaire ; avec vingt couples la secousse était insupportable. »

Dans sa première communication à la Société royale, en date du 18 juin 1801, Davy, entre autres faits nouveaux, avait montré qu’on pouvait construire une pile avec un seul métal placé entre deux liquides différents, pourvu toutefois que l’oxydation n’eût lieu que sur une seule surface de ce métal. À la séance suivante, Wollaston présenta un travail très-important sur lequel nous aurons à revenir, et qui tendait à prouver que l’oxydation du métal était la cause première des phénomènes voltaïques.

Wollaston confirma, du reste, les rapprochements établis par Volta entre l’électricité statique et l’électricité dynamique. Il réussit à reproduire en petit, par l’électricité ordinaire, les effets chimiques de l’électricité voltaïque, tels que la décomposition de l’eau et de certains oxydes. Il fit voir qu’il suffisait pour cela de diminuer excessivement les dimensions du fil plongé dans le liquide, de manière à concentrer en un seul point l’action trop peu prolongée de la machine électrique ordinaire[1].

Wollaston alla même jusqu’à rapporter à un fait chimique, c’est-à-dire à l’oxydation, la production de l’électricité dans les machines électriques ordinaires. Appelant l’attention sur l’enduit métallique, dont on a reconnu la nécessité pour les frottoirs, il annonçait que ces machines d’électricité ne se chargent pas dans le gaz hydrogène, ni dans les divers gaz qui n’exercent sur l’enduit des coussins aucune action chimique.

Ainsi, dès les premiers temps où la pile fut soumise à l’expérience, dès que les chimistes furent à même d’en observer les effets, la théorie de Volta soulevait des objections ou de graves répugnances. À peine née et précisée, cette théorie était déjà attaquée, soit dans sa base même, soit dans ses détails. Les mêmes difficultés que Davy et Wollaston élevaient en Angleterre contre le principe de la force électro-motrice étaient exposées en France par Gautherot, et en Russie par Parrott.

Volta sentit le besoin de se porter à la défense de sa théorie menacée. Pour faire connaître exactement à l’Europe savante sa découverte et ses idées, il prit la résolution de se rendre à Paris, qui était alors le foyer brillant et privilégié d’où rayonnaient sur le monde entier les vérités nouvelles acquises à la science.


  1. Wollaston décomposa l’eau en la soumettant dans un tube, à l’action de deux fils métalliques d’un centième de pouce de diamètre, espacés entre eux d’un huitième de pouce, et pouvant être mis au dehors en communication avec les deux garnitures d’une petite bouteille de Leyde. À chaque décharge de la bouteille, quand l’étincelle jaillissait entre ces fils, l’oxygène et l’hydrogène de l’eau étaient mis en liberté et se dégageaient à l’état de gaz.