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Arrivée à Paris le 5 septembre, la voiture à vapeur de M. Lotz avait fait, en huit jours environ, la distance de 400 kilomètres qui sépare Nantes de Paris.

Elle alla se remiser près du Champ de Mars, rue Desaix, à côté de l’usine de machines à vapeur de M. Flaud. Elle remorquait trois fourgons à deux roues, chargés des principales pièces d’un atelier et d’une maison de dépôt que M. Lotz fonde à Paris. Huit ouvriers accompagnaient ce convoi.

Après quelques jours passés à Paris, la locomobile de M. Lotz se rendit à Chelles, près de Versailles, pour commencer le service de transport auquel elle était destinée, dans les plâtrières de M. Parquin, situées non loin des ruines de la célèbre abbaye de Chelles.

La figure 221 représente, d’après nature, la voiture à vapeur de M. Lotz. Elle est de la force de 15 chevaux et pèse 10 tonnes. On voit qu’elle consiste en une locomobile ordinaire, dans laquelle l’appareil moteur est placé par-dessus la chaudière. Le piston du cylindre à vapeur, au moyen de la tige A, fait tourner une petite roue B, autour de laquelle s’enroule une chaîne à maillons, dont l’autre extrémité vient embrasser un tambour, qui fait tourner la roue motrice C. Le foyer est placé en D, entre les deux roues de derrière. E, est le réservoir d’eau qui doit alimenter la chaudière.

La direction de la voiture se fait par un levier placé en avant, et qui est mis en action par la main d’un conducteur.

Au moyen d’une barre d’attelage F, semblable à celles des wagons de nos chemins de fer, cette locomobile peut traîner des voitures pleines de marchandises, des wagons à voyageurs, etc.

Sur une route droite, n’ayant pas de pente au-dessus de 3 à 4 p. 100, sa vitesse de marche peut atteindre 20 kilomètres à l’heure, en remorquant une charge réelle de 4 500 kilogrammes. Sa vitesse moyenne est de 16 kilomètres à l’heure.

En petite vitesse, pour des transports de marchandises, sa marche est de 6 kilomètres à l’heure, en remorquant de 12 000 à 16 000 kilogrammes.

Cette machine peut franchir des rampes s’élevant jusqu’à 8 p. 100 ; mais alors en diminuant la charge, ou en réduisant la vitesse de la marche.

Un juge compétent, M. Tresca, sous-directeur du Conservatoire des arts et métiers, a été appelé à exprimer son avis sur la voiture à vapeur de M. Lotz. Nous trouvons son opinion sur cet appareil, formulée dans le Bulletin de la Société d’encouragement du mois de juin 1866.

M. Tresca apprécie, comme il suit, les avantages et les inconvénients de cette voiture à vapeur.

« La machine de M. Lotz, dit le sous-directeur du Conservatoire des arts et métiers, ne se recommande par aucune invention bien précise. Elle est, d’une manière générale, douée d’une extrême rusticité, et c’est seulement en comparant sa construction générale avec celle des machines employées antérieurement, que l’on peut se rendre compte des efforts de persévérance qu’il a fallu dépenser pour vaincre, sous ce rapport, toutes les difficultés de la question. Il n’y a pas à craindre d’accidents en route de ce côté. Les roues sont larges, elles n’endommagent point le sol ; au contraire, en certains points elle a fonctionné comme un rouleau à vapeur en l’affermissant.

De petites difficultés se sont cependant produites.

Elle ne tourne pas toujours avec la précision désirable ; il faut perdre quelquefois du temps pour la manœuvrer dans les courbes.

Elle fait un bruit incommode, par l’échappement de la vapeur. M. Lotz a essayé d’y remédier, en entourant la cheminée d’une double enveloppe remplie de sable, mais le résultat a été presque nul.

Hors des tournants, la manœuvre est facile ; elle arrête, elle dévie sans difficulté.

L’arrêt et le démarrage se font certainement avec plus de facilité que pour les voitures chargées, traînées par des chevaux. Il n’est pas impossible qu’on s’en serve bientôt, sans accidents, sur toutes les routes, sinon dans les rues plus fréquentées.

La terreur causée aux chevaux, et qui a motivé la réglementation anglaise, n’a pas été aussi grande qu’on aurait pu le penser.

Nous avons pris note de tous les chevaux rencontrés. Un sur cent s’est effrayé ; et encore, il faut