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paquebots ou bâtiments de commerce, bien qu’ils semblent devoir en tirer des avantages moindres, on les voit cependant depuis quelques années, l’adopter de préférence. Presque tous les bâtiments à vapeur que l’on construit en Angleterre, pour le service du commerce, sont munis de l’hélice. En France, on tend de plus en plus à suivre cet exemple, et pour la plupart des constructions navales, on a recours aujourd’hui à l’hélice, de préférence aux roues.

Pour donner une idée exacte des nouveaux navires à hélice, et pour présenter, en même temps, des types intéressants de notre marine militaire actuelle, nous représentons (fig. 118) un des plus beaux vaisseaux de notre flotte cuirassée, le Solférino, lancé en 1863.

L’impression que produisit l’arrivée sur une rade, d’un vaisseau cuirassé, fut toute particulière. Lorsque le Magenta ou le Solférino apparurent aux yeux des marins, ils excitèrent une stupéfaction railleuse. Dans ces constructions insolites, tout différait d’aspect avec nos anciens vaisseaux, monuments grandioses, élégants, d’une hardiesse de lignes éminemment agréable à l’œil, ce qui a toujours fait dire qu’un vaisseau de haut bord est le chef-d’œuvre du génie humain.

Un vaisseau cuirassé, comme le Magenta ou le Solférino, présente, en effet, au premier aperçu, un aspect vraiment baroque. Son avant, incliné vers la flottaison, à l’encontre des constructions ordinaires ; son arrière, qui rappelle celui d’une lourde galiote hollandaise ; sa mâture écourtée, tout cela ne ressemble en rien aux constructions habituelles de la marine militaire.

Cependant, en approchant plus près, l’œil exercé d’un marin découvre dans ces façons excentriques, une raison d’être au niveau des exigences de la guerre actuelle. Marche, aménagements, artillerie, tout répond victorieusement, dans nos vaisseaux cuirassés, au but que l’on s’est proposé.

Le Solférino a les dimensions d’un vaisseau de 90 canons. Comme tous nos vaisseaux cuirassés, il n’a que deux ponts ou deux batteries, au lieu des trois ponts de nos anciens vaisseaux de guerre. Le poids de la cuirasse nécessite ce retranchement. Les murailles des batteries sont recouvertes de plaques de fer de 15 centimètres d’épaisseur, qui, descendant en dessous de la flottaison et remontant de 4 mètres au-dessus, viennent se terminer à l’étrave et à l’étambot, à l’avant et à l’arrière des batteries. Ici se trouvent donc les parties vulnérables du navire. Mais une muraille de fer intérieure protége efficacement l’avant et l’arrière des batteries. En un mot, toutes les œuvres vives sont à l’abri des projectiles.

La mâture et le gréement sont ceux d’un trois-mâts goëlette, et lui permettent d’atteindre, à la voile, la marche d’un navire ordinaire. L’aération du bâtiment (chose très-importante) est dans les meilleures conditions de salubrité, conditions qui manquent aux frégates.

Tout fait croire que ces navires atteindront leur but de destruction, but, hélas ! peu philanthropique, que le génie moderne s’est proposé dans l’art naval, révolutionné par les découvertes récentes.

Une hélice de la dimension de 6 mètres donne au Solférino une vitesse de 12 à 13 nœuds.

L’étrave est garnie d’un éperon en bronze, lié au navire.

Nous laissons à l’imagination du lecteur le champ libre pour se faire une idée des dévastations que peut produire un éperon, un engin de guerre, de cette sorte.

La force de la machine à vapeur du Solférino est de mille chevaux. Sa longueur, de verticale en verticale, est de 86 mètres ; sa largeur de 16 mètres, son tirant d’eau, en charge, de 7m,8.

Un équipage ordinaire de vaisseau (800 hommes) donne la vie à ce monstre flottant. De vastes logements permettent à un amiral