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— La beauté et l’esprit, c’est lourd pour un homme seul.

— Que veux-tu dire ?

— Je juge que celui qui épousera mademoiselle Foubry devra être fort pour porter ce double fardeau de la beauté et de l’esprit.

Louis Dormont se redressa et jeta négligemment :

— Je crois qu’il vaudrait mieux que nous nous en allions d’ici. Mon foie est en bon état, le tien n’était pas malade, et tes parents t’attendent.

— Je ne leur ai pas écrit mon arrivée, nous avons donc tout le temps nécessaire, restons encore quinze jours, ce n’est pas que le pays m’intéresse, mais les heures y coulent aussi bien qu’ailleurs.

— Soit, restons encore.

Les deux amis étaient persuadés mutuellement que chacun ne tenait plus au séjour, et par conséquent à mademoiselle Foubry.

Mais chacun aussi, était ravi de la détermination de rester, de son adversaire.

Durant ce colloque, Sylviane rentrait à son hôtel.

Dans sa chambre, elle reprit un peu de calme, mais elle vit ses traits bouleversés. Les yeux s’enfonçaient, plus sombres, dans son visage pâli, et ses lèvres, closes par le chagrin secret, perdaient leur fraîcheur.

Elle se réconforta en se raillant de son manque de courage, lissa ses cheveux, se poudra et alla frapper à la porte de sa vieille amie.

— Je comptais trouver mère, chez vous, dit-elle.

— Non, ma mignonne, mais restez un moment, vous me ferez plaisir. Vous êtes pâle, il a fait chaud aujourd’hui.

Sylviane se laissa tomber plutôt qu’elle ne s’assit sur le siège que lui désignait Madame Bullot.

Cependant, elle chassa ses préoccupations et ce fut d’une voix naturelle qu’elle put répondre :

— Oui, il a fait très chaud.