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vous le dire ?… il a voulu vous connaître davantage avant de formuler sa demande.

Sylviane continuait d’être silencieuse, mais deux larmes coulaient sur ses beaux traits.

— Vous pleurez !… s’écria Madame Bullot.

— Oh ! murmura Luc… bouleversé… pardon mademoiselle… je n’ai été qu’un sot…

— Ma mignonne… demanda la vieille dame… expliquez-moi votre pensée… J’étais si heureuse à l’idée de votre avenir… que je me suis peut-être exprimée trop brutalement…

Sylviane voulut parler, mais Luc ne lui laissa pas le temps :

— Mademoiselle Foubry éprouve un sentiment que je devine… J’ai été indigne… je n’aurais pas dû donner suite à cette idée excentrique… À force de voyager… on perd la notion exacte du tact… Encore une fois… pardonnez-moi, mademoiselle…

Sylviane murmura :

— Je vous pardonne… monsieur…

Sa voix était grave. On sentait qu’elle refoulait ses pleurs avec peine. Elle se leva pour s’en aller.

— Vous me quittez !… s’exclama Madame Bullot… vous n’allez pas vous sauver avec ce visage chaviré… ne soyez pas froissée pour une gaminerie de ce grand Luc… Allons… ma petite Sylviane… riez !…

Mais la jeune fille ne le pouvait. Atteinte dans sa sensibilité, elle s’avouait désemparée.

Elle trouvait cavalier, cette façon de s’introduire dans sa vie par un procédé qu’elle jugeait déloyal. Seule, avec sa vieille amie, elle eût pu traduire sa pensée, mais elle ne voulait pas blâmer la conduite de Luc qui paraissait contrit et désolé.

Elle sentit cependant qu’il fallait parler et dit avec effort :

— Je suis bien surprise…

— Dans tous les cas… vous avez joliment de perspicacité… prononça Madame Bullot… vous avez reconnu Luc d’une manière magistrale !… Je n’y aurais vu que du feu…

— Je me croyais bien caché… avoua le jeune