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trop belle

Elle trouva Madame Bullot, affairée moralement, car la pauvre dame ne bougeait pas. Ses mains s’enveloppaient d’ouate et elle-même paraissait atteinte d’un torticolis douloureux.

Elle s’écria à l’entrée de Sylviane :

— J’ai trouvé mon brave homme… j’y ai songé tout d’un coup… c’est une connaissance de longue date qui a passé de nombreuses années à Londres.

— Ah ! tant mieux !… riposta Sylviane.

— Ma mignonne… vous êtes gentille d’être venue… Je voudrais que vous me lisiez ces papiers avant que M.  Daniel arrivât… Mes yeux n’y voient pas… Puis, vous lui dicterez ces feuillets… Je veux avoir une copie afin de les renvoyer à celui qui me les a prêtés… en vue de ma traduction… J’y ajouterai des commentaires…

Sylviane trouvait bizarre cet engouement littéraire poussé soudain chez sa vieille amie, mais il était sûr qu’elle pouvait employer ses loisirs comme elle l’entendait.

Elle se mit en devoir de prendre connaissance de ces pages avant l’arrivée de M.  Daniel.

— Ah ! dit soudain Madame Bullot… j’ai reçu un télégramme de Luc… il est à Vienne…

— Je croyais qu’il partait pour l’Écosse… murmura Sylviane en rougissant.

— Sait-on jamais ce que fera ce garçon ! Il est plein d’imprévu… mais charmant… ne trouvez vous pas ?

— Il m’a semblé fort bien…

— À mon avis… il est trop bien… pour d’autres qui ne le sont pas assez… mais on n’y peut rien. Je bavarde !… travaillons pour que M.  Daniel puisse écrire…

— Il a une machine ?

— Ah ! non… par exemple ! je ne veux pas de ce tintement et de cette petite sonnette chez moi… Nous nous servirons de plumes… avec un encrier… tout à l’ancienne mode…

— Quoi… pas même un stylographe !…

— Nous avons du temps à perdre… mon enfant, et nous irons doucement…

Madame Bullot ne put s’empêcher de rire devant