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la musique, pour agréer davantage à un fiancé aussi généreux, dont elle était l’unique et constante pensée.

Mais comme elle le disait, des engagements de sa part étaient donnés et elle trouvait peu correct d’y manquer. Elle se jurait de n’en pas promettre d’autres, mais l’entraînement avait raison de sa volonté et quand on venait la supplier d’écrire quelques notes, elle n’osait s’y refuser.

À dire la vérité, on venait aussi beaucoup par curiosité. Des gens qui ne la connaissaient pas et avaient entendu parler d’elle, désiraient la voir et prenaient ce prétexte pour venir lui parler.

Sylviane ne devinait pas ces subterfuges.

Avec sa bonne grâce coutumière, elle accueillait les quémandeurs et leur promettait pour un temps indéterminé ce qu’ils demandaient.

Il y avait aussi les autographes qu’elle ne voulait pas refuser par simplicité. Elle estimait prétentieux de se dérober.

Elle pensait que, mariée, cette vogue cesserait. Elle irait en voyage, et ensuite, elle composerait à ses moments perdus, bien tranquillement, uniquement pour satisfaire son besoin d’activité.

Après quelques jours où Luc fit bonne contenance et ne laissa pas trop percer d’ombrage, il retomba dans son tourment. Il savait que ce n’était pas seulement les essayages et les préparatifs du mariage qui absorbaient ainsi Sylviane.

Il se désespéra de ne pas posséder entièrement l’esprit de sa fiancée. Comme toujours, ce fut sa tante qui reçut ses confidences :

— Il m’est impossible de m’y accoutumer, je vous le jure, ma tante, j’ai fait des efforts nombreux, mais je ne réussis pas. J’ai cru, un moment, que j’allais devenir moi-même musicien, tellement j’y ai mis de la bonne volonté. Je voyais Sylviane si charmée de ma conversation, que je l’ai trouvée plus belle que jamais, mais Madame Foubry a eu la malencontreuse idée de me dire que le matin même, ma compositrice n’avait pas eu une minute de libre et cela m’a complètement arrêté dans mon élan.